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1 juin 2012 5 01 /06 /juin /2012 05:24

 

 

Je suis heureux.
Mes amours de Québécois ne se laissent pas faire. Se manifestent. Résistent.
L'une de mes trois Geneviève me donne des nouvelles du front régulièrement.
Via Facebook qui, décidément, me permet les plus belles relations de la terre.
Les plus belles rencontres. Les plus belles amitiés. Les plus belles amours.
Comme des opportunités professionnelles.
On joue de la casserole, la nuit, dans les rues de Montréal.
On y demande plus de justice. Plus de démocratie.
Et le La Fayette en moi fulmine de ne pouvoir rejoindre mes amours de Québécois.
Cette jeunesse éclairée. Qui demande séparation des pouvoirs et libertés.
" Ramène tes fesses ! " m'implore-t-on. Quand je n'ai pas un sou pour le faire.
L'excuse toute trouvée de ma lâcheté. Qu'il me reste à écrire.
La marque, ici, que je ne suis pas indifférent au mouvement.
Qu'il m'enchante, au contraire. Soulève mon enthousiasme.

L'occupation de Wall Street m'avait déjà impressionné.
La révolte de Montréal me bouleverse. Ces amours de Québécois ? Des moutons ?
Avais-je entendu cela longtemps ? Le pragmatisme. Le civisme. La discipline...
Certes. Ce sont leurs qualités. Mais qui n'empêchent pas l'esprit critique.
Ni la conscience politique. Ni le refus de tout subir et accepter.
Eh bien voilà. Montréal donne l'exemple à cette France qui cause beaucoup.
L'esprit des Lumières ? Où est-il ? De quel côté de l'Atlantique ?
Qui viendra soutenir cette colère légitime qu'on cherche à étouffer ?
Quelle démocratie peut cautionner des lois interdisant de manifester ? La France ?
Va-t-elle regarder cela les bras croisés ? Sans dire un seul mot ?
Elle qui a décerné la Légion d'honneur à Jean Charest ?
Allons-nous laisser tomber le Québec une seconde fois ?
Je le sais, ce n'est pas l'affaire des Etats. Mais celle des citoyens.
J'en suis un. Et si je ne vais pas sur place. Mes amours...
Je vous soutiens. Vous applaudis. Et vous embrasse.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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31 mai 2012 4 31 /05 /mai /2012 01:22

 

 

La fenêtre était peut-être mal fermée. Elle s'est ouverte. Franchement.
Laissant entrer un air chaud comme peut entrer un vent glacial. Avec la nuit.
Venu m'enduire de sa texture érotique, me couvrir de son haleine et de sa peau.
Volutes. Méduses. Et du sperme dans l'eau. Substrats. Substances. Chimiques.
Le sucre dans le café. La cendre dans le cendrier. La cocaïne. En poudre. Lassée.
Lascive. Partie en fumée. Quand le vent est tombé. L'éponge.
C'est le sel qui me ronge. Dérangé. Perturbé. Masturbé.
La nuit m'arrache. Me déracine. Me décompose.
Le coeur explose. C'est délicieux. Fantastique.
A ce silence. Qui dure. Qui plombe.
Qui plaque tout. Au sol. Aux murs.
Où j'oublie qui je suis.

Ma vieille syphilis. Et ses accès de fièvre.
Qui ne mènent nulle part. Qui me perdent au feuillage d'un arbre pétrifié.
Je crève l'oreiller. Je déchire les draps. Laboure le matelas. Et je prends du plaisir.
A l'air chaud qui m'abîme. Et je m'écorche vif quand ma peau est de trop.
Quand je m'en déshabille. Que je la jette à l'eau.
Je suis fou d'être en vie.
Et l'amour que je mords jusqu'au sang est le frein au suicide.
Auquel je me cramponne. Les ongles enfoncés.
Quand le bonheur violent devient insupportable.
Et qu'à le vivre seul, il est une torture.
Trop grand. Trop beau. Trop chaud. Trop doux. Trop fort.
Je ne peux contenir ses assauts quand il vient m'écraser.
Je ne pourrai seul lui survivre pour mieux m'en délecter.
La nuit est un miracle. J'en suis le seul témoin.
Et je mourrai d'en vivre aux lueurs du matin.

La fenêtre s'est ouverte. Mais dormez braves gens.
Je suis gardien de phare. Et je veille sur vous.
Et loup parmi les chats j'aurai la lune à l'oeil.
Au café qui me brûle. Comme l'air chaud sur moi.
Je la croise au feuillage, au plafond d'une rue ou au-dessus des toits.
Elle fait monter les eaux où le sperme s'étire. Et me brise les os par excès d'attraction.
La lumière est entrée. Et l'ombre pour escorte. Avec toutes les odeurs de la végétation.
Quand l'arbre n'est pas de pierre. Qu'il vivra plus longtemps que moi ou mes semblables.
Tous en apnée. Ou perdus dans vos rêves. Je tiens en garde l'arnaque du temps réel.
Qui égoutte ses secondes au marbre immémorial de ce qui a été, et de ce qui sera.
Respirez mes amours. Je rôde avec le diable. Pour tenir à distance l'absurde et la folie.
Qui s'enroulent à mes bras. Qui s'enroulent à mes jambes.
Me prennent pour un pantin et m'ont cloué au lit.
Me lèchent en entier. De salive d'essence. Et craquent l'allumette.
N'auront plus à vous prendre en faisant feu de moi.

Je brûle de désir sur un bûcher d'images.
De fantasmes baroques et de rêves gothiques.
Et loup parmi les chiens, garde un oeil sur la lune.
Qui fait monter les eaux où le derme s'étire. Et me brise les os par excès d'abstractions.
Des voix comme chimères voudraient me détourner. M'attirer dans le piège de récifs et rochers.
Faire couler mon phare et des bittes arrachées aux quais des amarrages.
La fenêtre s'est ouverte et le diable est entré.
Je suis froid. Et en nage. Il va falloir lutter.
Pour remettre de l'ordre dans les nuits dérangées.
J'ai ôté le tee-shirt. Et je sors de la douche.
Le diable, je le prends, et je lui fais sa fête.
Je le lèche en entier. De salive d'essence. Et craque l'allumette.
La chaleur de l'été s'évapore, éthérée. Pour sortir de nos têtes.
Et l'amour qui me mord vient fermer la fenêtre. Il relève le drap.
Pour une extrême onction, la dernière, aux lueurs du matin.

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 20:19

 

 

Il a fallu marcher au soleil et longer cette pinède.
Son tapis d'aiguilles et son ombre de résine odorante.
Castelldefels était sous mes yeux, au-delà des boulevards,
l'enfance chevillée au corps pour avancer dans ma ville éternelle.
L'été sera sublime pour être le dernier.

 

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 19:47

 

 

Mes platanes. Mon soleil. Et ma ville. Et ma soeur. Qui m'appelle.
" On va à Canet ? "... Mais bien sûr ! Tout le monde à la plage !
The place to be. La plage. La place de la Méditerranée. Les terrasses de café.
Du monde partout. Mon soleil. Et ma soeur. Et ma mer. Qui m'appelle.
Le bonheur à mes pieds. La chaleur. Une cobla installée qui nous joue des sardanes.
Le pays catalan. Encore lui. Qui joue avec mes nerfs et mon coeur impatient.
Qu'il est bon d'être bien. Qu'il est bon d'être aimé. Qu'il est bon d'être heureux.
Et je bouffe le ciel. Mon soleil. Et la mer en entier.
En attendant de te voir et de te dévorer.
 

 

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 01:18

 

 

Sur l'autoroute. Je ne pense pas à Olivier Steiner. Je roule.
Sans penser à cet oiseau qui est mort et que je regarde à peine.
Emporté dans le liège et les reliefs paisibles où la route bascule.
Je ne pense pas à Lana del Rey dont je n'entends que la voix sans l'écouter vraiment.
La nuit encore fut courte. Et mes yeux sont griffés par le sable. Enflés. Pesants.
Lourds et effervescents. Je dois faire des efforts pour les garder ouverts.
Le ciel est incertain. Ou bien c'est mon regard. Sorti de son orbite.
Pour se perdre après Mars que je contemplais la nuit au salon marocain.
C'était la nuit dernière. A son croissant de lune. A sa plâtrée d'étoiles.
Et l'été silencieux m'apportait les échos de fêtes environnantes.
La promesse d'y être invité, qui n'a pas besoin d'être tenue pour me combler de joie.
Le seul fait qu'elle existe pouvait me caresser et me voir ronronner au tapis de coussins.
Où je pouvais sourire. Soupirer. Et fumer.
Je ne pense pas au prochain échangeur. Aux bars de la Jonquère.
A l'Espagne où le ruban d'asphalte pouvait se dérouler
.
Ni à Philippe Uminski. Ni à la piscine qui m'attend dans un jardin de Rosas.
Lorsqu'on m'a perdu dans les constellations de cette nuit. Dans la cour aux bambous.
Je n'ai aucun regard pour les clochers de Figueres ni pour le château de Perelada.
Je regarde à l'intérieur de moi ce qui ne se voit pas derrière le pare-brise.

Quatre heures de sommeil. Pour si peu, autant ne pas dormir du tout.
Je reconnais le sourire de mon père. Je vois qu'il va bien. Et cela me rassure.
J'arrive à articuler des mots. A répondre aux questions. A me mouvoir dans l'espace.
Le soleil vient cuire mes épaules. Je peux enlever mes vêtements. Me mettre à l'aise.
Plonger dans la piscine. Dessiner une trajectoire semée de petites bulles. Une écume sous-marine.
Je suis une torpille. Et je ne pense à rien. Je traverse le bassin. Sous l'eau. Et je reviens.
Dans cette masse liquide transparente. Teintée du bleu du carrelage. Je ne pense pas. Donc, je suis.
Je m'effondre pour m'abandonner au soleil, allongé sur la margelle. Je regarde le ciel.
Ce n'est pas la voûte du planétarium de la nuit dernière, mais l'azur de midi, insoutenable.
Je ne suis pas capable d'échafauder des plans. De penser à la suite. A bout de souffle.
Je ne me rappelle pas avoir franchi le col du Perthus. Avoir pris l'autoroute.
Je reconnais la voix de ma soeur. Celle de Corinne. Le rire de papa.
Nous allons déjeuner sans doute. Je ne pense pas, donc, je suis.
Capable de respirer. Perlé de toute l'eau restée sur moi.
Je prends le soleil. Et le temps de le prendre.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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26 mai 2012 6 26 /05 /mai /2012 13:14

 

 

Une suite à Biarritz. A Lisbonne ou ailleurs. Evidemment.
Toutes les options sont possibles. Rien ne saurait empêcher un élan.
Quand les lieux ne sont pas des endroits mais l'envers d'un instant.
C'est le temps qui nous situe. Quand l'espace ne dit rien.
Que celui où je suis est un tournant sensible. La croisée des chemins.
Et que le courage, s'il m'en reste, sera encore de choisir.
Etre heureux n'est sans doute pas un but. Ce ne peut être qu'un effet.
Je sais qu'on peut l'être au choix de la torpeur, du chaos ou de la destruction.
Au plaisir de la fuite. A celui de l'oubli. De la mutilation.
Préférer au tatouage la scarification.
Les vies que l'on peut vivre s'imaginent sans cesse, peuvent être rêvées.
Participent à celle que l'on construit sans penser à construire.
Que l'on vit malgré nous, aux faits comme au réel, au temps qui nous échappe.
Les choix qui se succèdent, ceux que l'on ne fait pas, font partie du voyage.
Tout ce que l'on a fait, que l'on aurait pu faire. Nous sommes faits de tout.
De nos actes d'abord. De ceux qu'on a manqués. De ce que l'on espère.
Les désirs souterrains, brûlants, inassouvis, nous constituent autant que ceux que l'on étanche.
Quand ce sont les premiers qui nous tiennent, en haleine et debout, et nous font avancer.
A Lisbonne j'ai vu des brumes de faïence. De fados déchirants. De fritures amères.
Où je sentais rôder, la mort, la défaillance. Où je risquais ma peau pour la tendre aux chimères.
L'océan en brouillards jusqu'à la côte basque. Qui n'est pas mon côté mais la fin de mon monde.
Je pourrais revenir au bord du continent. A cet instant étrange où la terre devient plate.
Quand je suis déjà au sommet de falaises, contemplant des abîmes qui pourraient m'attirer.
Vous invitent à plonger. A sauter. A sombrer. De leurs beautés ingrates.
De promesses incertaines et d'illusions perfides qui me font délirer.
Le courage n'est jamais que le fait de trancher.

Le soleil sur la place me remet à la mienne. Il me visse à celle du présent.
Me cloue à la seconde où je m'en aperçois. Descendre dans l'arène de ma ville amorale.
Où je peux me frotter aux moindres abstractions et à l'indifférence.
Aux désirs trop pressants, je peux me masturber. Et passer mon chemin devant la cathédrale.
Libéré de démons qui n'ont d'autres fonctions que venir nous tenter. Je les salue bien bas.
Je leur dis à bientôt. Peut-être à tout à l'heure. Et souris à l'idée que je ne les déteste pas.
Lisbonne est dans mes rues si j'ai envie de Tage. Je sais que de fantasmes, je ne suis pas l'otage.
Quand c'est moi qui les tiens, captifs, à ma merci, en fais ce que je veux en bon maître d'ouvrage.
Je peux les invoquer pour me téléporter. Et les faire disparaître quand l'instant me suffit.
Celui qui se révèle à la chaleur du jour, au ciel bleu désarmant, qui m'écrasent ensemble
à la place où je suis, ravissant et ravi, quand j'aime autant séduire que ne pas décevoir.
Voilà bien deux forces contraires auxquelles on se déchire.
J'avance sur le fil, mes rêves en balanciers, du chemin que je trace.
Je vis ce que je peux. J'inventerai le reste. Ecrirai les douleurs
de mes choix courageux.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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25 mai 2012 5 25 /05 /mai /2012 13:04

 

 

Ton regard redessine tout ce qui a été gommé.
Mes yeux, mon nez, ma bouche. Mes mains qui s'ouvrent à ton cou.
Le sourire que tu m'inspires. Qui peut s'illuminer au tien.
Ce sont tes yeux qui me font réapparaître, qui me recomposent. Qui me reconstruisent.
Tu donnes chair au fantôme. Tu m'habilles de muscles et de peau et de poils.
Me rends mon sexe et mon cerveau. Et fais battre cette pompe qui ne servait à rien.
Le sang se précipite dans toutes les canalisations. Déferle dans tout l'organisme.
Pour réanimer la machine laissée à l'abandon.
Ton regard dépoussière tout ce qui a été recouvert.
Il a soufflé sur tout ce qui m'avait enseveli. Il a suffi d'une seconde.
L'électricité a parcouru tous les circuits. Et je peux me mouvoir jusqu'à toi.
T'embrasser comme premier être humain que j'aie vu depuis mille ans.
Pour ne plus te quitter. Te serrer contre moi. Avec la vie et le monde avec toi.
Qui n'existaient pas ou si peu. Que tu as dessinés tels que je voulais les voir.
Ton regard réveille et sublime tout ce sur quoi il aime se poser.
Et le monde avec moi est très reconnaissant.
Je m'y plonge. Je m'y étire. Je m'y plais.
Je pourrais y mourir sans l'ombre d'un regret.
 

 

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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24 mai 2012 4 24 /05 /mai /2012 09:49

 

 

Qu'il est bon le soleil du matin quand on n'a pas dormi.
Qu'il est chaud et mutin quand il nous a manqué.
Et qu'il revient enfin quand on ne l'attendait plus.
Qu'il envahit les rues, se répand sur les places, réchauffe ma façade
où j'ouvre les fenêtres, fou de joie, pour venir l'embrasser.
Je le prends en pleine figure et ma peau réagit.
Au massage qu'il me fait à peine tombé du lit.
Bien que manquant de sommeil, j'ai senti sa présence :
avant qu'il ne soit levé, l'aube annonçait la couleur pendant que je dormais.
Et j'ai ouvert les yeux, ne tenant plus en place, j'ai fait valser les draps.
Ne pouvais rater ça. La fatigue oubliée. La vie est éphémère. Je m'en suis rappelé.
La faim au ventre, j'étais en appétit. De vivre et de manger. La lumière comprise.
Etat d'urgence. L'été est là. Je le veux. C'est mon tour. Je lui ferai honneur.
Je le dévorerai. Et je n'en perdrai rien. Et n'en laisserai rien.
J'ai sauté à son cou. Pour ne plus le lâcher.
La nuit est derrière moi. J'ai besoin d'un café.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 07:33

 

 

L'aigreur. Brûlures d'estomac. L'acidité du jus de citron sans doute.
Son petit frère avait reposé le verre, ça ne lui avait pas plu du tout.
Dans les grands verres à orangeade, maman avait versé ce qui devait être un rafraîchissement.
A l'ombre de la pergola prête à céder sous le bougainvillier à la monstrueuse floraison rose.
Au-delà, le soleil était blanc. La chaleur accablante. Enivrante. Et la sieste s'imposait.
Nous étions sortis de table. Les cigales s'en donnaient à coeur joie.
Leur tintamarre assourdissant devenait aussi envahissant qu'angoissant.
A ces heures d'inaction où les adultes disparaissaient dans leurs chambres.
Laissant seul le baby-sitter, repus, somnolant sur sa chaise longue.
C'était l'heure de la digestion. Trop tôt pour aller s'ébrouer dans la piscine.
Louis s'était endormi sur la banquette marocaine à l'ombre de la tonnelle.
Sur ses cahiers de coloriage. La joue écrasée sur un coussin. La bouche ouverte.
Emma se rendit compte qu'elle était la seule à veiller encore sur la maison.
Alexandre, dans son débardeur blanc, ronflait sous un chapeau de paille.
Papa et maman s'étaient retirés à l'étage. Et elle n'avait pas sommeil.
Seulement mal au ventre. Sous ce ciel bleu menaçant au-dessus de cet océan de cigales.
Lever la tête et plisser les yeux au soleil éblouissant lui donna le vertige. Elle dû se tenir.
Ses jambes étaient en coton. Le sol se dérobait sous ses pieds. Elle ne se sentait pas bien.
Le vacarme de la cymbalisation amplifiée par des milliers d'insectes invisibles
l'oppressait au point de la rendre folle. Elle voulut courir à l'intérieur sans pouvoir bouger.
Elle serrait très fort le fer forgé du dossier de la chaise auquel elle s'agrippait.
Quand tout tournait autour d'elle. Incapable de prononcer un mot quand elle avait envie de crier.
Une chose pourtant, soudain, bien que discrète, vint enfin la tirer de sa torpeur.
Emma s'aperçut qu'elle n'était pas la seule encore éveillée. Ce qui la rassura un peu.
Sur la terrasse, apparut la silhouette féline de la chatte de la maison. A pas de velours.
Ce qui eut pour effet immédiat de mettre fin au vertige nauséeux de la petite fille.

Emma allait joyeusement s'élancer vers Marette qui s'apprêtait manifestement à rejoindre Louis.
Elle s'arrêta net et regarda fixement Emma qui se figea à son tour pétrifiée par ce qu'elle crut voir.
La chatte reprit tranquillement sa marche indolente jusqu'à la banquette où dormait son petit frère.
Y parvint aisément en sautant avant de s'allonger de tout son long à l'endroit où la toile était fraîche.
Emma se frotta les yeux un moment. Chercha à bonne distance le regard de Marette qui ronronnait.
Heureuse d'avoir trouvé le lieu où un léger courant d'air rendait la canicule supportable,
la bête fermait les yeux, déterminée à ne rien faire de plus que le reste de la famille.
Inquiète, Emma se demanda si elle avait rêvé. Si elle avait eu une hallucination.
Etait-ce la chaleur ? Le jus de citron ? Avait-elle de la fièvre suite à une insolation ?
L'espace d'une seconde, elle aurait juré...
" Tu ne dors pas ? "
Alexandre avait relevé le bord de son chapeau et lui adressa un sourire un peu désolé.
" Non. Je n'ai pas sommeil... " Elle hésita un instant et renonça à lui parler de son mal au ventre.
Le baby-sitter savait qu'il aurait dû se lever et lui proposer une activité pour lui tenir compagnie,
mais il manquait de courage. La chaleur le clouait à la chilienne transformée en hamac.
" Tu devrais te reposer un peu. Allonge-toi avec un livre... " proposa-t-il mollement.
Embarrassé à l'idée que la petite fille puisse s'ennuyer, il jeta un oeil alentour sur la terrasse,
sur Louis qu'il était content de voir assoupi, et n'eut pas le temps de faire d'autres suggestions.
Ce grand dadais s'était rendormi. Ce qui aurait d'ordinaire beaucoup amusé Emma.
Mais ce qu'elle avait vu l'avait tellement impressionnée qu'elle n'avait pas le coeur à rire.
Elle était encore sous le choc. En avait froid dans le dos.
Ce qui était une drôle de sensation par une chaleur pareille.
Il lui fallait vérifier par elle-même que ce qu'elle avait pensé voir n'était pas vrai.
D'ailleurs, ce n'était pas possible. Et elle devait s'assurer que tout était normal.
Elle dut se faire violence pour s'approcher de Marette. Elle l'appela doucement.
La chatte tourna la tête vers elle, impassible, ouvrit ses yeux de chat avant de les refermer.
Ce qui tranquillisa complètement Emma qui vint s'asseoir auprès d'elle pour la caresser.
L'espace d'une seconde, et cela lui avait glacé le sang, Emma avait cru voir
que les yeux de Marette étaient ceux d'un humain.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

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22 mai 2012 2 22 /05 /mai /2012 03:46

 

 

La chevelure s'est déployée à ce dernier coup de tête.
La sueur s'en est échappée pour tomber au sol comme une giclée de foutre.
Le danseur s'est figé dans une position. Ruisselant comme un boxeur.
Le front mouillé. La chemise trempée. Quand le cajon s'est tu.
Aux sabots d'un cheval qui danse, le sol s'est remis à trembler.
Et le taureau qui ne craint pas la pique semblait sur le point de charger.
Grattant l'arène d'une patte concentrée cherchant le starting-block.
Le picador peut s'armer. La bête est prête à éventrer sa monture.
Une robe moulante évasée aux genoux de sa traîne de volants rouge sang,
épouse les hanches rondes et la chute de reins d'une Andalouse pulpeuse.
C'est le corps d'une femme. Ou celui de la femme. Qui donne la vie et la reprend.
Les cheveux noirs comme le pelage du cheval et celui du taureau et celui du boxeur,
comme ses yeux assassins qui tranchent sur sa bouche écarlate au rideau d'un théâtre.
Les couleurs de Toulouse ou celles de Stendhal. C'est l'aube contre la nuit.
Et le sang s'en échappe pour tomber au sol comme une giclée de foutre.
A ce coup de poignard. En plein coeur. Dans le ventre. Qui vient faire le noir.
Les guitares épuisées au clair de pleines lunes cessèrent de crépiter.
Laissant une odeur de soufre sur la scène du drame.
La pupille arrondie sur le fessier parfait du torero cambré ou sa cuisse bandée.
Sur la poitrine de sa promise s'interdisant de s'époumoner aux montées d'adrénaline.
Les roses peuvent pleuvoir sur le cadavre d'un rival valeureux.
Des plaintes portées par des voix rauques sont couvertes par l'incendie des cuivres.
Aveuglant au soleil qui vient clouer les âmes et des corps aux gradins.
La Madone est priée, vénérée, embrassée sous des torrents de larmes.
C'est la Mort qui triomphe. Jusqu'aux signes de croix.

 

 

 

Philippe LATGER
Mai 2012 à Perpignan

 

 

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Lectures

 

 

Stéphane Facco  Stéphane Facco 

 

Lambert Wilson  Lambert Wilson 

 

  Contes du Jour et de la nuit

      Véronique Sauger     

 

Lettres à ma ville

  (spectacle des Estivales juillet 2000) 

 

 

  publication chez Soc&Foc 2012 

La terre est rouge

 

interview la terre est rouge

 

 

 

 

  Parolier / Discographie 

 

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