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31 mars 2012 6 31 /03 /mars /2012 03:45

 

 

" Qu'est-ce que c'est ?...
- Regarde.
- Wow. Fantastique les enfants, regardez !
Une nouvelle version de Pierre et le Loup ! Génial ! Qu'est-ce qu'on dit ? "
Et, tous ensemble : " Merci Parrain ! "
" Non, regarde Alexandre, le fou, c'est en diagonale. Tu vois ? Comme ça. "
Tatie Geneviève arrive à son tour, avec un panier du jardin. La fête est à son comble.
Elle annonce le contenu : aneth, fenouil, roquette, chou-rave, radis...
Il semble clair que la partie d'échecs est terminée. Je remballe en riant.
Un clin d'oeil pour remercier le parrain de mon fils.
Qui a rejoint sa mère et sa tatie avec une flopée de cousins côté cuisine.
" Comment tu vas ?... "
Tu me demandes cela sur ce ton qui exclue la formule d'usage.
Je sais à ton regard que c'est une vraie question.
" La maison est pleine de gosses. Il fait beau. Tu es là.
Alors je vais bien. "

La maman d'Alexandre s'en va en Amérique.
Et veut l'emporter avec elle. L'inscrire à l'école dans le New Hampshire.
Je t'avais envoyé un simple texto. " Laurence demande le divorce. "
Je ne savais pas en l'écrivant si je révélais une bonne ou une mauvaise nouvelle.
Tout le monde fut surpris quand nous nous entendions apparemment à merveille.
On m'a demandé si je l'étais moi-même.
Répondais, sibyllin, que je l'étais qu'elle le fasse si tard.
Le mariage était son idée. Sa condition pour être plus précis.
Tu t'étais moqué de moi à l'époque. Je l'ai fait pour le petit.
Il est beau. Il est vif. Et il va m'arracher le coeur pour l'emporter avec lui.
" Tu pourrais t'y installer.
- Quoi. A Manchester ?
- Que tu écrives ici ou là-bas. Quelle différence ?
Installe-toi à New York. Ou à Montréal. Pour te rapprocher.
- Tout seul ? Tu es sérieux ? Pour me rapprocher, tu es sûr ? Ou m'éloigner ?...
- Te rapprocher de lui. Tu sais bien. "
Emilie, sa cousine, était furieuse, voulait déclarer la guerre à Laurence.
Elle avait fait irruption un soir à la maison, bouleversée, quand elle a su ses intentions.
Elle ne me conseillait pas de me battre pour la garde d'Alex. Elle m'ordonnait de le faire.
Pour son bien. Parce qu'il avait grandi ici. Que nous étions tous ici.
Qu'un juge le comprendrait. Que je n'avais qu'à faire valoir mes droits.
Sa fille avait l'âge d'Alexandre. Nous avions constitué une joyeuse tribu.
" C'est sa mère... avais-je répondu sobrement.
- Et nous sommes sa famille ! argua-t'elle du tac au tac.
Fais-le pour lui si tu ne le fais pas pour toi. Qu'est-ce qu'il va faire, tout seul, en Amérique ?
Est-ce que quelqu'un seulement lui a demandé son avis ? "
Alexandre en changeait sans cesse au gré des arguments présentés.
Il voulait partir avec maman. Ne voulait pas laisser papa. Voulait rester ici avec papa.
Ne voulait pas que maman le laisse. En fait, il en avait un parfaitement arrêté.
Papa et maman. Tout. Sauf avoir à choisir.

C'était la flûte traversière de l'oiseau. Le hautbois du canard.
Ou non. Plutôt le basson du grand-père qui lui plaisait le plus.
Quant au final, autant vous dire que nous l'avons entendu une fois et une autre.
Laurence n'aimait pas nous le laisser. Mais nous l'avons emmené quand même.
Tous les deux. A l'auditorium du Conservatoire. Perrault et Ravel. Un même spectacle.
Avec les Percussions Claviers de Lyon. Alexandre adore la musique.
Les instruments de musique. Il était fou de joie.
Nous avons rejoint ta femme et tes enfants qui rentraient de chez leurs grands-parents.
Chez vous. Passé un excellent après-midi. Les gosses ont joué ensemble.
" Tu sais que tu peux compter sur nous. Quoi que tu décides.
- Allez Alex, tu fais la bise ? Il faut qu'on rentre maintenant...
Oui mon vieux. Je sais. Je n'oublierai pas. "
Evidemment, Alexandre n'avait pas envie de partir. Il râlait. S'énervait. Protestait.
Et comme la crise de larmes commençait à monter toute seule.
" Allons mon grand, les garçons vont devoir passer à table,
il faut que nous les laissions manger tranquillement, et tu dois avoir faim aussi.
Je suis sûr que ta tante nous a trouvé encore plein de légumes bizarroïdes... "
Pas très convaincu, il dit au revoir à tout le monde, le coeur chagrin.
" On les invitera d'ailleurs, dans la semaine, à venir en manger avec nous à la maison. "
Tu me fais un signe de la tête qui dit veut dire oui.
" Hier, c'était des pâtissons farcis... fis-je en écarquillant les yeux comme pour vous prévenir.
Je découvre avec lui. Nous allons chaque jour de surprise en surprise. "
Je me demandais s'ils faisaient pousser des artichauts d'Israël. Là-bas. Dans le New Hampshire.
Alexandre n'a pas trouvé ça bon mais a apprécié quand même concédant que c'était très joli.
Le chat est venu s'enrouler dans nos jambes sans l'accompagnement d'une clarinette.
Geneviève, fidèle au poste, nous avait préparé un dîner de derrière les fagots.
Laurence devait passer le chercher à onze heures.
Dans une tempête de neige comme on en trouve aussi bien en Nouvelle Angleterre
que dans les campagnes russes de Prokofiev
et où l'on ne sait plus très bien qui de nous deux est le loup.

 

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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29 mars 2012 4 29 /03 /mars /2012 00:41

 

 

Je m'étonne d'avoir laissé la télé allumée.
Je pose mes courses sur la table, cherche la télécommande.
Décidément. Moi qui vérifie toujours le gaz avant de sortir de chez moi.
Qui fais toujours un tour d'appartement pour m'assurer que j'ai bien éteint les radiateurs.
Suis capable de remonter les étages ne sachant plus si j'ai bien fermé à clé.
Voilà un syndrome qui porte un nom je crois.
Une fois le verrou tourné à double tour, sur le palier, quitte à me mettre en retard,
il faut que je revienne constater que j'ai bien pensé à fermer la fenêtre de la chambre.
Ok. Je perds la tête. Je devais penser à autre chose.
J'éteins le téléviseur. Et j'embarque mes provisions dans la cuisine.
J'ai des choses à mettre au frais.
J'ai envie d'un thé et remplis la bouilloire au robinet.
L'eau chauffera le temps de vider les sacs. Ranger les courses.
De la viande au congélo. Des fruits dans la corbeille. Chaque chose à sa place.
Une porte claque et me fait sursauter.
Putain de merde. La fenêtre de la chambre...

Je dois être surmenée.
Depuis que Jacques est parti, je me réfugie dans le travail.
C'est ce que me dit Laurent. Adorable garçon. Qui se fait du souci pour moi.
Je ne dors pas assez. Je prends des trucs pour dormir. Des trucs pour me réveiller.
J'ai perdu du poids. Moi qui avais toujours rêvé d'en perdre.
Voilà. J'étais convaincue d'avoir fermé la fenêtre de la chambre ce matin.
Je la ferme. Elle est fermée. Et je peux aller boire mon thé tranquillement.
Sauf qu'une idée me traverse l'esprit.
Je regarde la photo de Jacques sur la table de chevet.
Il faut qu'il y ait un courant d'air pour qu'une porte claque comme elle a claqué.
Quelque chose d'autre est ouvert dans cette maison.
Je frissonne soudain. Une impression de froid sur moi.
Ou celle de devenir complètement folle.
Je sors de la chambre, vérifie la salle de bain dont le vasistas est fermé.
De retour au salon, je trouve la baie vitrée de la terrasse entrouverte.
Soulagée d'avoir élucidé le mystère, je me lance en maugréant encore.
Arrêtée net. Par une pensée. Soudaine. Quelqu'un serait-il entré dans l'appartement ?
Ma bouche se sèche. Mon coeur s'emballe. Mon sang se glace. Pour une raison simple.
Je suis sûre de n'avoir pas ouvert cette baie vitrée depuis des jours et des jours.
Je m'approche un peu inquiète. Quelque chose ne tourne pas rond.
Et, au moment de saisir franchement la poignée de la porte vitrée,
je pousse un cri et sursaute à la bouilloire qui se met à siffler.
J'ai porté ma main à la base de mon cou, les yeux fermés, pour retrouver mon souffle,
la paume collée sur le médaillon de ma mère, et je ris malgré moi de moi-même.
Mes doigts jouent nerveusement avec la chaîne délicate du pendentif.
Dont j'ai hérité. Le temps de recouvrer mes esprits. De fermer la baie vitrée.
Il me faut couper le sifflet de cette maudite bouilloire. La faire taire. Et boire mon thé.
Je m'empare de la télécommande, éteins la télévision, et file arrêter le gaz dans la cuisine,
où je sors agacée un sachet du carton d'emballage pour le pendre au bord d'un bol
dans lequel je verse l'eau bouillante, remets le carton à sa place dans le placard
d'où j'extirpe des biscuits, claque la porte du petit meuble, en soupirant, consternée,
m'assurant, tout en ne voulant pas y penser, qu'il n'y a d'autres signes d'intrusion,
avant d'emporter ma collation sur la table basse.
Je m'affale enfin sur mon canapé. En vidant mes poumons au maximum.
Expirant tout ce que je peux de mon stress et de ma fatigue.
J'ai besoin de vacances. Laurent a raison. L'adorable garçon.
Qui est sans doute un peu amoureux de moi. Timide. Maladroit. Mais gentil.
Il m'a proposé sa maison à la campagne pour le week-end. Pour y aller. Même seule.
Je bois une gorgée de thé. Pourquoi pas ? Même si la campagne m'angoisse...
Je pose la tasse sur la table. Lentement. Mes yeux se posent sur la télécommande.
Yves Calvi, sur l'écran, animait tranquillement un numéro de C dans l'air...

Le goût de Laurent pour le paranormal, ajouté à sa gentillesse,
me fait douter soudain de sa sexualité. Un peu soulagée et vexée à la fois.
Je l'écoute me parler d'un médium qu'il connaît et sait détecter les mauvais esprits.
Son enthousiasme me touche autant qu'il m'horripile. Il semble passionné par cette affaire.
La maison pourrait être envoûtée. Ou hantée par d'anciens locataires.
A son effusion, j'ai l'intuition que son ami Dorian n'excelle pas seulement dans l'art de la voyance
et du maniement du pendule, qu'il pourrait avoir un don pour tout autre chose.
Je n'ai pas pu faire autrement qu'appeler Laurent le soir-même, prise de panique,
quand le gaz s'est allumé tout seul sous la bouilloire pour la faire siffler à nouveau.
Ma soeur ne répondait pas au téléphone. Et Anne, ma meilleure amie, ne prend plus mes appels.
Elle me fait la gueule depuis que Jacques est parti.
Jacques... Je lance un regard interloqué à Laurent qui s'interrompt en en découvrant la stupeur.
" Quoi ?... J'ai dit quelque chose ?... Marina, qu'est-ce qui t'arrive ? Parle-moi. "
L'empreinte visible de la silhouette d'un homme dans le duvet sur le lit.
Comme si quelqu'un s'était allongé dessus de tout son poids...
Mes rêves érotiques où il me faisait l'amour et tentait toujours de me dire quelque chose,
juste au moment où je me réveillais en sursaut. La sensation de présence dans la pièce.
" Appelle ton Dorian. Qu'il ramène ses fesses. Jacques a quelque chose à me dire. "
 

 

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 00:59

 

 

Le silence plein de musique.
Je l'écoute. Amnésique.
Nouveau né. Je ne viens de nulle part.
Je n'ai rien connu. Je suis neutre.
J'écoute.

Je découvre la techno de mon coeur qui bat.
Le flamenco de mes doigts sur le clavier de l'ordinateur.
Et la voix qui vient me parler dans le creux de l'oreille.
Le blues de la fumée expirée par mes naseaux.
" Donne-lui sa chance... "

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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27 mars 2012 2 27 /03 /mars /2012 05:14

 

 

Des fourmis dans les jambes.
Gustavo Dudamel. L'orchestre dans ma chambre.
J'ai du sable collé aux épaules. Du sable dans les cheveux.
Playa Mar Bella. Copacabana. La serviette autour du cou.
Où l'on peut voir d'avance ce qui est prêt à être consommé.
Sur place ou à emporter.
Remonter les pelouses du parc de la Ciutadella, entre ses didgeridoos et ses tam-tams.
Des souvenirs du Monument à George-Etienne Cartier au pied du Mont-Royal.
A Barcelone, comme au Québec, on pratique le diabolo et autres exercices de jonglerie.
On promène ses boas, ses iguanes, et l'on expose ses tatoos au soleil.
Il suffit de s'engager dans la Calle Princesa, traverser la Laïetana,
et vous voilà retournés à l'hôtel avec des inconnus, sympathiques, prêts à faire la fête.
Ils viennent d'Australie. D'Amérique. D'Argentine. Du Brésil.
" Comment ? Encore un Carlos ?... Dites. Vous avez d'autres prénoms au Mexique ? "
Transats sur le toit-terrasse de l'Hôtel Axel. Au beau milieu de l'Eixample.
En voilà un, qui loue à quelqu'un qui loue à quelqu'un qui loue un appart sur la Rambla.
Ces mannequins venus de Budapest et de Prague, partagent en colocation
un piso maravilloso sur Aribau, et se croisent à poil dans les couloirs en sortant de la douche.
Il y a une Fashion Week. On peut faire des défilés pour Desigual. Des photos dans la rue.
Et un peu de porno, pour le plaisir seulement, puisque ça paie moins bien.
On arrive chez des gens que personne ne connaît. Il y a du champagne et des pailles.
De la musique à fond sur une belle terrasse. Où l'activité sera de partouzer.
Barcelone a changé messieurs-dames. Les Jeux Olympiques sont loin.
Et le Talgo usé, du bleu de mon enfance, me dépose au milieu du désordre.

L'appart de la Calle Canuda. Et ses doubles rideaux.
C'est pour mieux y grimper mon enfant.
L'appart de la Rambla de Catalunya. Le merveilleux attique.
Où le verre, où les coeurs, furent maintes fois brisés.
Le whisky se retire pour mieux laisser éclore des fleurs syphilitiques.
J'ai perdu au Metro l'enfant de huit ans qui suivait ses tantes au Corte Inglès.
" J'ai le souvenir qu'il sniffait déjà l'eau de Cologne. " La Lavanda Puig. Si Señor.
Pouvais-je encore le voir à l'arrière de la DS monter au parc d'attractions de Montjuïc ?
Le barman au regard ravageur offre le dernier verre.
Etions-nous descendus au Jazz ou au Sant Agusti ?
Penelope Cruz est en ville. Pour le tournage de Sahara.
Dominique Blanc dîne à côté de nous aux Carmelitas.
La suite du Hilton sur la Diagonal est déjà de l'histoire ancienne.
Et je sais dans ma chair, au dilemme amoureux, que la balance penche du côté du Julius.
Taxi ! Direction la Barceloneta. Ai-je vraiment pu y faire livrer des fleurs ?
Des week-ends entre amis. Je n'ai pas assez de doigts pour les compter.
La maison de Castelldefels est celle d'une autre vie. Quand je suis jeune adulte.
Au Schilling aussi, on me sert du whisky comme succédané à mon eau de Cologne.
Le barman au regard ravageur offre le dernier verre.
Et la Plaza Real sent le teuch à plein nez.
Cap sur la Terrraza au Pueblo Español pour me faire voir un moment.
Je fends la foule, les yeux vitreux, les lèvres irritées, le sang à fleur de peau,
comme après le poppers, la tête immense, et en hauteur, je me poste pour observer la faune.
" Qu'est-ce que tu fais ? Tu pars déjà ?... " Pas convaincu. Trop mou. Trop sage.
Je n'ai qu'une envie : las Torres de Avila. Me faire défoncer la poitrine par les basses.
Un lieu merveilleusement étrange. La confusion des genres. Les passerelles.
Les drags. Les drogues. Les pelles et les pipes faciles. Le coeur bat sous mes yeux.
Adopte le tempo martelé d'une techno lascive. Où je me laisse caresser par tout le monde.
Le miracle est christique. J'ai changé mon sang en whisky.
Mister Hyde a son côté gothique. Rien n'est assez bizarre pour le rendre curieux.
J'ai laissé des amis à leur disco de plage, et sombre avec délice dans un manoir de monstres.
Le Fellini était trop gentil, trop tranquille. J'aime la décadence et les sensations fortes.
A mon bal des vampires, on me mord, on me suce, j'ai des frères pour escorte,
des hallucinations.

L'enfant de dix ans qui mangeait des churros à l'entrée de Pryca,
a vu venir la Fira et le Nick Havanna, son dôme et son pendule.
17 ans et le goût du désir des adultes qu'il fallait exciter.
Et les années passant, la fête devint un art, un brin dégénéré.
La conduite de la voiture qui grillait les feux rouges et cherchait Rossello ou Provença.
Et me voici au port, entouré de mes putes, dont certaines n'étaient pas bien rasées.
Aux rideaux du Rembrandt, mon coeur est amoureux. Et j'emplis mes poumons.
J'ai appris que le sexe, régulier, avec une même personne en qui l'on a confiance,
permet l'exploration favorable à l'orgasme. Patiente. Voluptueuse. Attentive.
Et que l'équation est simple : avec des sentiments, et le respect de l'autre,
et le respect de soi, le sexe devient grandiose. Une révélation.
C'est une découverte. S'installer dans le temps. Synchroniser le plaisir.
Jouir au même moment. L'explosion nucléaire.
Le balcon où je bronze sent le gel et le sperme. Et la crème solaire.
La Plaça de la Vila de Madrid comme décor et ses tombes romaines.
Les paupières gonflées. Epuisé d'avoir baisé ou ronflé. Un petit-déjeuner.
Sous les arbres de la Plaça del Bonsuccés. Ravissante.
L'odeur du pavement mouillé ou lavé à grande eau.
La magie de ce soir où l'on me présentait à Juliette Gréco.
La dame sortait de scène. Celle du théâtre grec. En plein air.
Thierry Suc en costume de lin blanc avec son panama qui fumait le cigare.
Les jardins qui épongeaient la chaleur d'un été tropical quand j'avais de la fièvre.
Il y eut des étoiles et des feux d'artifice. Dans une ville faite pour la fête.
Où quand le coeur est lourd l'ambiance est un supplice.
Quand il y a peu de place pour la mélancolie.
Il faut serrer les dents. Se forcer à sourire.
La nuit impitoyable détecte les faussaires.
Mister Hyde a la carte. Et son taux de cynisme.
Quand la route fut longue. Du Paseo Tramuntana à la Plaça de Catalunya.
Du petit Tenis Park aux nuits du Baja Beach. Des bars de Playafels à la suite du Ritz.
Le bureau du notaire, Paseo de Gracia. Le hall du Majestic. Et la gare de Sants.
L'hôtel AC Vilamari. Hôtel Ciutat de Barcelona. Prestige Hotel. Hôtel Advance.
Et autant de nuits agitées. De rencontres. De ruptures. D'accidents.
Dans une ville qui m'a connu à l'âge de trois mois pour un premier été.
Qui m'a vu grandir d'une année sur l'autre. Rituellement. Et que j'ai vu changer.
Je m'y suis installé. Je l'ai perdue de vue. Et dois la retrouver.



 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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26 mars 2012 1 26 /03 /mars /2012 15:00

 

 

Le soleil s'est levé sur une ville en cendres.
Les décombres d'une nuit pathétique où tout s'est effondré.
La station orbitale est tombée sur la terre.
Une balle d'argent logée dans ma poitrine. En plein coeur.
J'ouvre les yeux. J'ai la gueule de bois.
Je vérifie mes mains, mes pectoraux, ma ceinture abdominale.
La lune n'était pas pleine. Je n'étais pas transformé. N'étais pas loup-garou.
La balle n'a procuré que le choc de l'impact. N'a pas été fatale.
Une main sur mon sexe pour compter mes testicules.
Une main sur ma pomme d'Adam. Sur mon front. Je suis toujours vivant.
Le soleil de midi me ramène à mes normes. Le besoin de café. Le besoin de tabac.
Perpignan s'agite à mes fenêtres, indifférente aux torpeurs de mes nuits.
Le platane est stoïque et le marteau-piqueur. Tout me pousse sous la douche.
Debout camarade. Tu n'as pas dit ton dernier mot.

Bien sûr, d'un même évènement,
il y a autant de versions que de gens pour en donner.
Deux témoins d'une même scène ne racontent jamais la même histoire.
Et je sais bien que nous n'avons, toi et moi, pas passé le même week-end.
Je me trouve déterminé, au milieu de ce jour, à garder ma propre perception.
A ne pas exposer aux doutes mon illumination. Et mon bonheur vorace.
Je me battrai pour protéger ce souvenir parfait d'un second coup de foudre.
Malgré les coups de griffe et les complications.
Après tout, à l'espace des fenêtres, il n'y a que ma personne.
Et seul en ma demeure, c'est encore moi qui gouverne.
J'ai le droit, sans offenser quiconque, de sublimer le temps qui fut passé ensemble.
De le voir sous l'angle positif de ses meilleurs aspects qui n'ont jamais manqué.
Que je sois amoureux ne dérange personne.
Et personne ne peut me reprocher de vouloir être heureux.
Je repousse les assauts de toutes les idées noires, qui cherchaient cette nuit,
à me faire sombrer, à m'abattre dans la rue, à me faire la peau.
J'époussette la lune, le ciel de ses orages, avec la volonté de faire place au soleil.
Il est là. Et même mes scrupules n'ont le droit de venir le voiler.
Je n'ai rien fait de mal. N'ai pas à m'en convaincre.
Et quitte à être seul, que je prenne la barre, celle de mon navire.
Que j'ai laissé aux remparts partir à la dérive.
Je reprends les commandes et mes résolutions.
De t'aimer fermement, contre vents et marées, contre toi s'il le faut,
qui est le meilleur endroit pour retrouver la paix.

En effet, être encore plein de toi ne gêne pas ton programme,
tes devoirs, ta journée, et tes obligations.
Ce que je vis ici peut rester à ta porte, sans t'envahir, t'embarrasser,
quand tu peux aussi bien n'en savoir pas grand-chose ou le mettre de côté.
Si je suis libre, tu l'es aussi. Je ne demande rien et n'ai rien demandé.
Si cela t'intéresse, tu sauras, d'une manière ou d'une autre, que je te remercie.
Que je suis ébloui. Et que je n'ai pas l'intention de salir notre histoire.
Même s'il y a des voluptés aux sombres déchirures, aux tourmentes nocturnes,
aux furieux mélodrames, aux chagrins fantastiques, je choisis le soleil.
Je choisis le printemps. Mon arbre qui bourgeonne. Le ciel bleu.
Le désir de lumière et le rire des enfants. Je choisis la vie. La vie.
Le chat de cette nuit n'était pas loup-garou. A fait son tour de piste.
Et celui qui s'étire aujourd'hui accepte tout de toi pour être indépendant.
Tu viendras quand tu veux. Je prends ce qu'on me donne.
Je sais qu'il y a du bonheur qui m'attend, à Paris, Perpignan, bientôt à Barcelone,
que l'été est devant, et tout ce que j'affectionne, et cela m'en procure, maintenant,
au point de chanter sous la douche Gainsbourg ou Jil Caplan.
Tu as de ton côté, tout ce qu'il faut pour être bien. Qui ne serait comblé ?
A tenir tant de choses si bien faites et construites.
Sans moi, tu as déjà l'équilibre parfait dont tout le monde rêve pour se réaliser.
Je serais misérable de venir le compromettre. Loin de moi cette idée.
Je te préfère solaire sans moi que lunaire avec moi.
Je ne me pardonnerais pas d'abîmer ta lumière.
D'éteindre de mes mains celle qui me nourrit.

En fait, c'est cela. T'aimer ici, comme je le fais,
ne coûte rien à personne, et ne dérange rien.
Cela me fait du bien sans autres conséquences.
Ça ne t'engage pas. Ne chamboule en rien l'ordre du monde.
C'est ma force souterraine et mon conditionnement.
Pour ouvrir la saison irradié de confiance.
Et ce jour qui commence.
Qu'il me reste à créer.


  

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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26 mars 2012 1 26 /03 /mars /2012 14:20

 

 

Les verres vides sur les tables de café au soleil.
Les bouteilles de Coca-Cola. Font des éclats.
Aux lumières rasantes. Aux lunettes de soleil.
C'est la mer qui scintille on dirait.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses lorsqu'on est deux ?
Sur ma rampe gothique, c'est la nuit qui est tombée.
Le jour du changement d'heure. C'est ma nouvelle année.
Une date essentielle qu'il me fallait fêter. Seul ou accompagné.
C'est le point de bascule. Vers la saison solaire.
Une date pour moi bien plus importante que celle de mon anniversaire.
Avec celle du printemps. Qu'elle vient confirmer. La rampe vers l'été.
Quand il fait encore jour à l'heure du JT.
Avec mes potes les chats, j'erre dans les ruelles profitant de douceurs.
Que l'air du soir apporte après les fortes chaleurs.
Il me fallait marcher. Me dégourdir les jambes. Saluer mon tombeau.
Au Mont des Oliviers. Où le ciel se prêtait aux cours d'astronomie.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses lorsqu'on est amoureux ?
Un fin croissant de lune, sur le dos, s'offrait à l'étoile du berger, un peu pâle,
il est vrai, comparée à la lueur effrayante de la station orbitale.
J'ai pensé à Tintin. L'étoile mystérieuse. Une odeur de fin du monde.
Dans ma ville déserte écrasée par l'espace.
Au lieu d'un premier baiser, j'ai fumé une clope.
Avec l'allure du gars qui sort le chien après dîner.
Ce que je sors c'est l'ombre de moi-même.
Et j'invoque le ciel pour me reconstituer.
La lune me sourit. D'un sourire inquiétant.

Je ne sais pas ce qui s'est passé.
Puisqu'à vrai dire, je ne sais pas ce qui se passe.
Le silence. La distance. Laissent bien de la place aux questions.
Que je refuse de me poser. Un soir de fête.
Quelque chose peut-être s'est cassé. Sans que je m'en rende compte.
Et peut-être saurai-je le fin mot bien assez tôt.
Egoïste pour égoïste - ai-je le choix ? - c'est moi qui m'occupe de moi.
Je me sors aux étoiles et au baume érotique d'un après crépuscule.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses lorsqu'on est heureux ?
Que je rentre un peu tard ne gênera personne.
Je n'ai pas à me justifier d'un texto à quiconque.
Et, comme il fut entendu, en effet, je fais ce que je veux. Tu es libre.
Oui... Je le suis. C'est ce que me dit cette lune pincée. Toute mince.
Comme un dessin d'enfant sur les toits de St-Jean.
Libre d'être heureux ou d'avoir mieux à faire.
Ici je m'évertue à jouir de la matière.
C'est un vertige étrange de n'être attendu par personne.
De n'avoir aucun compte à rendre. Aucune obligation.
Se dire : je pourrais mourir là, maintenant, qui s'en rendrait compte ?
Au bout de combien de temps ?...
Cette idée me fait rire. Quand c'est la seule école.
L'école pour apprendre à mourir. Quand nous mourrons tous seuls.

L'escalier est superbe. Tranchant sur la muraille.
Je dois être philosophe. Accepter que tout a une fin.
Je l'ai vu de mes yeux à la mort de ma mère.
Je l'ai vu de mes mains à la mort des amours qui se sont succédé.
J'ai survécu à tout, même aux pires douleurs qui ne furent pas grand-chose.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses lorsqu'on est ambitieux ?
Quelle est mon ambition ? Si ce n'est d'exister.
Mon but n'est que de vivre tant qu'on me le permet.
Le bonheur n'est une fin que pour les magazines.
On en vend les recettes dans toutes les librairies des aires de service.
Je suis prêt à souffrir si l'heure est au supplice.
Ce sera vivre encore. Mais d'une autre façon.
Faire les mêmes choses dans d'autres conditions.
Les voir différemment. Avec un regard neuf.
Je passerai mon chemin si je suis inutile.
J'ai pu faire mon temps. Je peux ne plus servir à rien.
Je dois être philosophe. Rien n'est indispensable.
Quand le monde tourne encore même avec tant de morts.
Je sais qu'il n'y a qu'à moi que je ne pourrai pas survivre.
Et en jouissant des choses, de la nuit, de ma ville, de la lune,
je peux bien accepter l'idée d'être oublié.

Je ne vis pas pour être aimé. Je n'écris pas pour être lu.
Je n'oblige personne. Ni à me lire. Ni à m'aimer.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses lorsqu'on est vaniteux ?
Je réalise que je n'ai rien demandé à qui que ce soit.
Puisque, comble de l'orgueil sans doute, c'est ma seule politique.
On me prend. On me jette. Je continue ma route.
Qu'il est doux d'être seul au-dessus des marasmes,
débarrassé de cette peur panique qu'est celle d'être abandonné.
J'imprime à nouveau le décor des remparts.
Avec cette impression d'être passé ce soir pour lui dire au revoir.
C'est comme à Paris cette façon d'aller rue du Square Carpeaux.
Saluer les lieux où j'ai su être heureux, malheureux, peu importe.
Un lieu où j'ai vécu. Un lieu où j'ai été.
Il n'y a que toi qui sais si c'est l'heure du départ.
Je garde toujours en moi les gens que j'ai aimés.
Ils peuvent disparaître, ils ne s'éloignent pas, ne me quittent jamais.
Libre comme je le suis, je le suis de garder de nous deux le meilleur que l'on puisse.
Les souvenirs choisis de la fougue, du brûlant, de l'intense et du tendre.
Ces heures à regarder le regard l'un de l'autre. A s'y perdre. A s'y attendre.
Quand je te dois tant qu'il me semble impossible de rendre la pareille.
A la hauteur sans doute de ce que l'on doit à ses propres parents.
J'ai une dette envers toi aussi insurmontable.
Mes parents m'ont donné la vie. Et tu me l'as rendue.

Je pense au contresens d'une lecture ancienne.
Ce n'est pas à ma mère que je dois la magie de ce monde.
Mais à toi qui as su lui en donner.
Dieu qui peut revendiquer cette oeuvre que tu as rendue parfaite.
En effet. Je confirme et je signe. Même si tu dois me jeter.
Jamais je ne pourrai te rembourser le ciel, la terre, le vent, la mer, et l'univers entier.
Tout ce que tu as réveillé en moi, peut-être malgré toi, et le bonheur adulte.
Et je peux bien entendre n'avoir pas su donner tout ce bien en retour.
Quand j'ai toujours été inquiet, désireux de comprendre ce que diable
je pouvais t'apporter d'équitable.
Si vingt lunes suffisent, la première pour moi était inespérée.
A la seule rencontre, tu avais déjà ma reconnaissance éternelle.
Sans demander mon reste. Je n'aurais pas osé songer un seul instant à un seul lendemain.
Quand j'étais déjà redevable pour un coeur réanimé et le désir revenu dans mes veines.
Je l'ai dit, chaque fois, j'acceptais des bonus, semaine après semaine.
Sur mon chemin de ronde, au sourire de la lune, je prépare mes affaires.
Est-ce qu'on jouit mieux des choses quand on est courageux ?
Je m'endors avec toi. Et le bien que ça fait.
Quand je n'ai d'autre choix d'être encore égoïste.
Sans savoir ce qui se passe. Ou ce qui s'est passé.
Fin prêt à parer à toute éventualité.
Avec en moi cette révélation ou vieille certitude qui me crève le ventre.
Que jouir ne présente qu'un bien maigre intérêt.
Et que jouir ne vaut pas de pouvoir partager.


  

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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25 mars 2012 7 25 /03 /mars /2012 03:48

 

 

Le cadeau que tu m'as fait. Inestimable.
C'est d'abord de m'avoir choisi.
Quand tu dis que tu m'as reconnu.
C'est d'avoir voulu me connaître.
C'est d'avoir décidé de m'aimer.
C'est d'avoir surmonté, contourné les obstacles.
Pour rendre possible ce qui semblait être perdu d'avance.
Le cadeau que tu m'as fait.
C'est d'avoir accepté la foudre pour ce qu'elle était.
C'est de ne pas avoir fui. C'est de m'avoir tout dit.
Quand j'ai vu, au-delà du sourire, une soif d'absolu.
Un désir de confiance. Besoin de vérité.
Une telle exigence que j'en étais touché.
J'aurais pu m'échapper en craignant les épreuves.
Les contraintes et peut-être bien des difficultés.
Quand la rigueur, l'honnêteté, ne coûtent rien aux coeurs aimants,
et qu'elles simplifient tout à ceux qui aiment être heureux.
Le cadeau que tu m'as fait.
C'est de me réconcilier avec quelques valeurs.
Avec la discipline. Le respect. Le bonheur.
Et de me faire goûter aux plaisirs qu'elles procurent.
Comme à la liberté reconquise aussitôt.

Inestimable. La lumière allumée.
Le frisson que j'éprouve à ne penser qu'à toi.
Le cadeau d'avoir pu traverser des saisons.
D'avoir pu nous sauver des ravages du temps.
De m'avoir délesté de stupides impatiences.
Et de m'avoir rendu le tempo du long terme ou de l'éternité.
Le cadeau que tu m'as fait.
C'est de me ramener sur des terres édéniques.
Où je n'ai plus besoin de trahir mes amours de peur d'être trahi.
De tromper le premier dans mes guerres préventives.
Où je peux me donner sans craindre l'avanie.
Faire confiance sans penser aux blessures d'orgueil ou aux humiliations.
Le cadeau que tu m'as fait.
De nous garder au chaud dans un lieu abrité
où aucun de nous deux ne peut perdre la face.
Où nous pouvons nous voir comme à égalité.
Et aimer l'autre pour soi comme pour ce qu'il est.
C'est un soulagement d'être aimé pour soi-même.
De pouvoir apparaître sans tricher, sans mentir et sans exagérer.
D'enlever son armure et tous ses barbelés.
D'être offert, vulnérable, et plus fort que jamais.

Je serais misérable. Meurtri. Fatalement brisé.
A l'idée d'avoir pu te décevoir un jour.
Comme à celle d'avoir pu te blesser.
Que tu penses avoir pu te tromper sur mon intégrité.
Que je me fous de toi. Que je suis désinvolte.
Quand, sans aucun mérite, je n'ai cessé de progresser,
dans l'abandon des égoïsmes stériles et des fausses révoltes.
Que mon amour grandit au fil des nuits qui passent.
De ce que je découvre. De tout ce que j'apprends.
Que mon désir s'accroît. Que mes sentiments changent.
S'amplifiant davantage. Toujours plus enivrants.
J'en suis le premier troublé. Surpris par mes ressources.
Ces réserves d'amour restées inexploitées.
Que je n'explique pas. Qui m'étonnent autant que toi.
Et que tu libères enfin en un rire complice.
Que ton regard nourrit pour que tout s'accomplisse.
Qu'au moment où j'écris, j'en suis plus que certain,
tu es ma raison d'être et l'amour de ma vie.

Il y a des distances dont je ne suis pas responsable.
Que tu as eu le courage de réduire bien souvent.
Et peut-être à me voir de plus près, y aurait-il dans tes yeux,
à fendre des fantasmes, un fond de déception.
Tu peux me juger moi. Ne juge pas mon amour.
Quand je suis imparfait. Et que lui ne l'est pas.
Je peux être faillible, maladroit, négligeant.
Avec tous les défauts de l'ours célibataire.
Qui n'a pas tous les codes de la vie conjugale.
Qui a toujours refusé de s'imposer aux autres.
Et précisément, pour ne décevoir personne, a préféré longtemps
ne pas s'aventurer dans une vie à deux.
Je ne suis pas parfait. Mais je suis perfectible.
Et je veux bien apprendre dès que c'est avec toi.
Etre à la hauteur de l'amour qui m'inspire.
Pour que le bonheur que tu donnes ne reste pas qu'en moi.
Qu'il puisse te revenir au centuple. Décuplé au prisme de ma foi.
De mon envie de nous. De mon admiration.
De la fougue volontaire qui brûle dans mes doigts.

J'ai brûlé tout le long de mon observatoire.
Amoureux comme un chien et heureux comme un prince.
Quand j'ai eu ce cadeau de respirer ta vie au centre d'elle-même.
De te voir te coucher. De te voir te lever. Et de t'offrir aux autres.
Je suis fier de t'aimer. Et fier comme personne.
Je dois te remercier pour tout ce que tu donnes.
Les cadeaux, un à un, que tu m'as apportés.
Je ne te décevrai pas par mon ingratitude.
Trop conscient de ma chance. Ta générosité.
Quand j'ai pris dans la gueule un second coup de foudre.
Pour l'âme magnifique qui avait déjà changé tout le cours de ma vie.
Je suis chat de gouttière, sans gamelle et sans maître,
qui aime aussi fort son indépendance qu'il déteste
l'impression d'envahir, de gêner ou d'être un parasite.
Dont l'égoïsme est aussi vrai que la peur d'être un poids.
Qui commence toujours par dire au téléphone : " excusez-moi de vous déranger... "
A l'égoïsme, on ajoute l'orgueil, quand c'est aussi la marque de mon éducation.
Ainsi donc, pour ne nuire à personne, j'ai choisi d'être seul.
Ne prenant plus le risque que de me décevoir moi-même.
Mais pour un peu, mon amour, si cela se pouvait, si on me le permettait,
je serais prêt à prendre le risque de te décevoir mille fois.
Quand je ne pourrais vivre avec personne d'autre que toi.

Le cadeau que tu m'as fait. Inestimable.
C'est d'être la plus belle personne du monde.
La plus talentueuse. La plus gentille. La plus responsable. La plus sensuelle.
C'est d'être l'être idéal. Auquel on croit sans y croire comme on peut croire en Dieu.
Qui est conceptualisé. Mais qu'on ne peut attendre.
Le cadeau que tu m'as fait. C'est d'exister.
Même loin de moi. Même sans moi. Savoir que tu existes.
D'autres ont trouvé le Graal.
D'autres ont trouvé Jésus. D'autres ont trouvé leur voie.
J'ai eu la foudre de ces révélations en ne trouvant que toi.
Quand tout ce que tu es me touche. Quand tout ce que tu fais me touche.
Et je l'écris simplement. Si te décevoir serait une catastrophe,
il y aurait pire à mes yeux, c'est que tu me déçoives.
Je survivrais à l'idée que tu ne m'aimes plus.
Pas à celle que tu n'existes pas.
Pas à celle selon laquelle j'aurais tout inventé.
Tes regards dans le noir. Ta silhouette érotique. Et ton sens de l'humour.
Tes angoisses bouleversantes. Tes visions insolites. Et toutes tes gravités.
Ta peau faite pour la mienne. Ton goût pour la droiture et pour l'éternité.
Le cadeau que tu m'as fait.
C'est cette raison de croire que je n'ai pas rêvé
tous ceux qui ont précédé, et qui sont incroyables.

  

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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24 mars 2012 6 24 /03 /mars /2012 16:13

 

 

Le soleil comme liant. Entre tous les hommes.
Au pied de mon campanile disparu sous ses échafaudages.
Où des percussions résonnent contre les façades de la place de la cathédrale.
De la danse africaine. Des quinquas en boubous bariolés s'en donnent à coeur joie.
Célèbrent le retour du printemps entre les oliviers disposés sur le parvis.
Une foule de badauds hésite entre les terrasses et les boutiques.
Que je fends jusqu'à la rue de la fontaine froide. Je disparais rue des abreuvoirs.
Sans pull. Sans caban ni blouson. En bras de chemise. Sourire aux lèvres.
Un oeil sur les vitrines de la Maison Quinta d'où sortent des doñas cramées aux UV.
Visages mangés par des lunettes noires Gucci, Prada, Dolce & Gabbana.
Avant de m'installer au coin, au dos du Castillet caressé franchement par une lumière estivale,
à une table ensoleillée du Café de la Poste, pour me noyer dans le peuple du monde.
Le drapeau catalan sur la porte monumentale de la ville est parfaitement immobile.
Il n'y a pas un souffle de vent. Et la chaleur vient se précipiter sur moi sans l'ombre d'un obstacle.
Entre deux platanes satisfaits qui s'étirent de bonheur aux assauts voluptueux du ciel bleu.
Je ferme les yeux au baiser du soleil. Tends le menton. La tête en arrière. Calé dans mon fauteuil.
Pour mieux éprouver la jouissance d'être en vie sur la planète Terre.
Autour de moi, il y a des Catalans prétendus de pure souche. Des pieds-noirs. Des Gitans.
Catholiques. Musulmans. Juifs. Arabes. Juifs arabes. Marocains. Algériens. Tunisiens.
Des Celtes venus des îles britanniques venus dans le fief de l'USAP, ce haut lieu du rugby.
Et j'embrasse la ville où les hommes sont en paix. Et ce pays génial où l'on peut vivre ensemble.
Où le soleil fédère ceux qui aiment la vie.

Une chaîne humaine défile devant moi, passe sous la Porte Notre-Dame,
emmenée par R.Can, le rappeur de ces dames dans son petit tee-shirt,
en tête d'une sardane linéaire qui rend hommage au chanteur Jordi Barre.
Main dans la main, des hommes et des femmes de tous les âges, de toutes les générations,
de toutes les origines, passent devant ma terrasse dans un esprit de fête et de rassemblement.
Il y a de la musique. Des commentaires sportifs. Des familles qui charrient leurs poussettes.
Et je rends grâce à l'intelligence des hommes qui profitent du beau temps qui leur est imparti.
Je pense à Toulouse, à Paris, à Limoges. Imagine que ce doit être la même foule réjouie.
Au soleil de la Place de la Motte. Aux Buttes-Chaumont. Ou bien Place St-Georges.
Qu'après l'effroi, la vie reprend ses droits. Quand il faut se faire du bien pour mieux vaincre le Mal.
Je bois mon café en pensant aux jeunes Gitans que j'entendais parler dans la rue.
Lundi soir. En rentrant de chez Laetitia. En plein quartier St-Jacques.
" Les Juifs, ils sont gentils. Y'a des Juifs, ils sont gentils. Ils sont pas méchants. "
Le jeune homme était sincère. Semblait vouloir convaincre ses camarades.
Et des larmes montaient devant la Médiathèque,
quand je traînais mon ombre au pied de l'Hôtel Pams.
Oui mon frère. Les gentils sont gentils. D'où qu'ils viennent. Quoi qu'ils croient.

Et les méchants des gentils qu'on a abandonnés.
Les larmes sont revenues, sur le bord de mes cils, quand je rouvre les yeux.
Au soleil du week-end offert à ma conscience. Sur mon visage usé.
Qui crie au monde entier. Je suis Juif. Musulman. Mi-croyant. Mi-athée.

Ma ville est frontalière. Perpignan. Catalane. A la fois espagnole et française.
Et je suis comme elle. A son image. Le cul entre deux chaises.
A la fois espagnol et français.
Et le soleil brille pour les deux versants des Pyrénées.
Comme pour les deux rives de la Méditerranée.
Ma mère castillane et son profil berbère. Mon père toulousain et son regard kabyle.
Notre Dieu ne saurait être l'otage d'un bâtiment et de ses quatre murs.
Quel que soit le nom que l'on donne à l'édifice. Quel que soit le rituel.
Dieu est ce soleil qui me roule des pelles. Fait ouvrir les platanes, les palmiers, et mon coeur fatigué.
Je le remercie pour l'espoir qu'il nous rend. Sa chaleur bienfaitrice. Féconde. Et réconciliatrice.
Le bronzage atténue mes blessures. Et quelques cicatrices. Ma façon de prier.
Je porte la kippa et un croissant de lune. L'étoile de David et l'amour de l'Islam.
Les lumières des esprits ouverts à l'univers, une seule Création pour une même extase.
Celle d'être vivant. Et mortel. Au soleil qui rend fier, qui rend humble.
Nous rend frères de lait. Nous rend frères de sang.
C'est sur le quai Vauban que je pose mes fesses. Fais durer le plaisir.
Des gens dansent à côté. La musique est cubaine.
Et je veux témoigner d'appartenir au monde.
Au Palmarium, des gamins de cités se retrouvent au fast food.
Face à une boutique où une famille chinoise vend des chaussures.
La Salsa est parfaite. Et j'aime Perpignan.

Le soleil comme liant me connecte à la somme
de toutes les cultures, de toutes les histoires, celles de tous les hommes.
Le Rap, le Flamenco, pour mieux nous mélanger.
J'ai le sourire hindou d'un Gitan rassuré. Prêt à faire confiance.
Je reviens d'Istanbul, de Damas, de Tanger,
de Venise, Tel-Aviv, du Caire ou de Valence.
J'ai le rire andalou, sicilien, aux vagues des vacances.
Qui aime les amandes et les danses du ventre. Quand la mer m'a vu naître.
Que l'été m'accompagne. Aux frontières des corps que je peux tous aimer.
Je salue le printemps qui pourrait être arabe. L'amour de l'existence et de la liberté.
Les rythmes de Cuba comme minutes de silence. Pour bénir les enfants qu'on nous a enlevés.
Et ce des deux côtés. Pour peu qu'il y en ait deux. Enrayer la violence. L'automutilation.
R.Can et son chapeau mènent une farandole sous la porte qui reste de remparts démontés.
On a détruit les murs qui enfermaient ma ville. Perpignan est ouverte. Et je m'ouvre avec elle.
Quand des gens de partout apportent leur sourire, leur art, leur savoir-faire,
leur talent, leur science, comme leur énergie, pour nous porter plus haut,
plus loin dans l'atmosphère, quand seul le métissage permet l'évolution.
La nature a besoin de toutes ses différences. Un homme et une femme.
La première mixité. La différence utile, nécessaire à la vie ou la procréation.
Les gènes ont leur sagesse et leur leçon brillante, autant de tolérance que de combinaison.
Et je ris sur le quai aux alliances superbes, aux alliages solides, à tous les assemblages,
qui font l'humanité et l'honneur de s'y fondre.
Au soleil qui me porte, depuis l'Est jusqu'à l'Ouest, du matin jusqu'au soir,
je peux vaincre la mort, pour être un bout du Dieu qui aime tous ses enfants,
n'en sacrifie aucun, se respecte lui-même, que je veux triomphant.
Quand il sert la justice.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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23 mars 2012 5 23 /03 /mars /2012 23:25

 

 

La Mosquée Bleue sur le Bosphore.
Le théorème de Pythagore.
Big Ben. L'Empire State Building.
La jungle de Rudyard Kipling.
Il suffit de fermer les yeux.
J'ai la médina de Tétouan.
Un estuaire face à Royan.
Le Colisée et l'Acropole.
Los Angeles. Mégalopole.
Et la baie de San Francisco.
Pour tout retrouver sur ma peau.

 



 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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23 mars 2012 5 23 /03 /mars /2012 14:04

 

 

La Charente est maritime.
La Corderie royale.
Et la pluie qui s'installe est glaciale.
La façade Art Déco d'un ancien cinéma.
Rue Jean Jaurès. Et toutes ses maisons basses.
Pour des rencontres éphémères à l'archet d'un alto.
Violons et contrebasses. Pour des vagues de cordes.
Qui m'emportent au Colbert pour quelques Marlboro.
Les parapluies ne sont pas de Cherbourg il me semble.
Pas de Michel Legrand aux Moulins de mon coeur.
L'Atlantique est ailleurs. Quand tes yeux lui ressemblent.
Quand ils se font rieurs. Que je me sais vainqueur.
Sur la pointe des pieds, à l'heure de nous rejoindre,
quand la ville endormie n'offre que le silence,
il y a des va-et-vient aux couloirs de la nuit.
Sur un terrain miné où la porte est secrète.
La passion de phosphore doit se faire discrète.
Et je dois me reprendre ou simuler l'ennui.
Moi aussi j'enregistre. Ce que l'on défenestre.
Et je me réveille seul. Comme un chef mutilé.
Sans pupitre. Sans orchestre.
Avec le goût amer des histoires impossibles.
Tes mains à mes poignets comme des bracelets.
Qui ont frotté leur crin à mes cordes sensibles.


 

 

Philippe LATGER
Mars 2012 à Perpignan

 

 

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Lectures

 

 

Stéphane Facco  Stéphane Facco 

 

Lambert Wilson  Lambert Wilson 

 

  Contes du Jour et de la nuit

      Véronique Sauger     

 

Lettres à ma ville

  (spectacle des Estivales juillet 2000) 

 

 

  publication chez Soc&Foc 2012 

La terre est rouge

 

interview la terre est rouge

 

 

 

 

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