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27 juillet 2011 3 27 /07 /juillet /2011 13:58

 

 

Evidemment, descendre la rue Grande la Réal me fait toujours de l'effet.
Passer devant le porche imposant de l'hôtel particulier, au-dessus duquel j'ai vécu.
Cette façade menaçante, protégeant un parc arboré, et une majestueuse volée d'escalier.
Ce studio transformé en home studio. Qui fut une garçonnière. Et un lieu de repli.
Que j'ai gardé quand nous avons pris cet appartement sur la Rambla de Catalunya.
Me poussant dans un Talgo un jour sur trois, entre Perpignan et Barcelone.
Derrière l'ancienne prison. L'accès par les jardins. Et la pisse de chat.
Le balcon sur la procession. Le porte-avions pour se projeter à Paris.
Mais aussi le lieu d'où je me sauvais au petit matin, après une nuit d'écriture,
pour rejoindre, deux rues plus loin, la chaleur d'un autre lit que je venais déranger.
Il me fallait sonner. Je devais réveiller quelqu'un. Le temps que l'on m'ouvre la porte.
Avant de mêler ma respiration à la sienne. Aux ébats embrumés, lovés dans le sommeil.
Aux nimbes où nous nous rendormions ensuite, ensemble, dans des draps apaisés.
La rue Saint-Mathieu. Déserte. Comme un passage secret jusqu'à la rue Neuve.
Le plaisir du plaisir. En toute discrétion. Dont celui d'ouvrir l'oeil dans les bras l'un de l'autre.
De reprendre ce que nous avions commencé quelques heures plus tôt.
La rue des Augustins chargée de souvenirs. La place des Poilus. Les balayeuses de l'aube...
Et quelques odeurs fades. Au plancher de l'appart, sur la porte cochère.

Evidemment, traverser la terrasse du Figuier me fait toujours de l'effet.
Quand il fallut, pour la créer, détruire l'immeuble où j'ai loué mon premier logement.
Rue Fontaine Na Pincarda. Pour quitter Bompas et la chape des chimiothérapies.
A deux pas de l'abreuvoir émouvant donnant son nom à la rue, il y avait mon adresse.
Pour les factures de téléphone et d'électricité. Quand j'étais sous les toits. Au dernier.
Pieds nus sur la terre cuite de tomettes. A me faire masser par des mains algériennes.
Quand tous les lieux sont empreints des gens que j'ai aimés.
Au détour de la Main de Fer, je découvre que l'îlot est crevé. Et l'immeuble rasé.
Remplacé par une forêt de bambous et de photophores. Un resto à la mode.
Où je viendrai dîner. Aimer le temps présent où j'aimais le passer. Avec d'autres.
Puisque tout se transforme. Et que tout semble vrai.
Quand je pourrais croiser le fantôme du garçon que j'étais, sortant de sa voiture.
Si différent de moi. Ou simplement plus jeune. Dont je suis fier. Qui me fait honte.
Qui peut m'embarrasser autant qu'il m'attendrit.
Et c'est tout le quartier qui a des dossiers sur moi.
Qui m'a vu ivre mort. Ou ivre de bonheur.
Et s'amuse de mon trouble. Aux coquilles cassées.

A marcher sur des oeufs, au nid où je suis né, parmi mes frères aussi vieillis que moi,
marcher dans Perpignan me fait, évidemment, toujours autant d'effet.
J'y retrouve des gens. Ceux qui me reconnaissent. Ceux qui ne me reconnaissent pas.
Ceux qui font semblant de me reconnaître. Ceux qui font semblant de ne m'avoir pas reconnu.
Et j'évite des pièges, au hasard du parcours, où je pourrais tomber me fracturer la jambe.
Quand j'ai mon lot d'entorses. De blessures de guerre. De maladies honteuses.
Passer devant la Bourse m'arrache la poitrine. Me griffe les mollets. Me crache à la figure.
Les noms et les sourires de ceux qui m'ont aimé. Que j'y ai rencontrés. A qui j'ai fait l'amour.
Et qui m'ont détesté. Et qui m'ont oublié. Et qui n'ont rien à dire à l'homme que je suis.
Que je suis devenu. Qu'ils n'ont jamais connu. Qui n'a rien à leur dire.
Et déguisé en vieux, je ne souris qu'aux lieux, qui ne jugent personne.
Comme je pourrai sourire à la rue de Musset, à la rue de l'Horloge.
Quand je le serai vraiment. Le jour où je viendrai. Me confronter aux temps
qui m'auront échappé, à venir m'émouvoir sur tout ce que je vis, ici et aujourd'hui.
Je reviendrai un jour, si Dieu me prête vie, ma rappeler combien j'ai pu être amoureux.
Je sais déjà le pincement au coeur qui m'empoignera face au square, et à certaines places.
Le doux-amer. Entre deux chaises. A lever les yeux vers l'Evêché. Et la tour de St-Jacques.
Un jour, je reviendrai. Sans être malheureux. Un brin mélancolique. Pour revoir mes fenêtres.
Sans l'ombre d'un regret.

Je le sais. A la rue Grande la Réal. A la rue Fontaine Na Pincarda.
J'ajoute de nouveaux lieux de recomposition. Des souvenirs en devenir.
Qui me tordront le ventre. Qui me tordront la gorge.
J'ajoute des visages et des regards que je n'oublierai pas.
Quand je serai trop vieux pour qu'ils me reconnaissent.
Dans un musée ouvert, je traînerai la patte. Saluant le fantôme de l'homme que je suis.
Qui aura écrit ce texte que j'écris maintenant. Pour laisser une trace. Dire qu'il a existé.
Je me dirai bonjour. Me saluerai bien bas. Je me remercierai de m'avoir incarné.
Et de m'être permis de si belles histoires. Etre heureux c'est aussi savoir qu'on l'a été.
Ce que je vis ici est gravé dans le marbre. Rien ne pourra jamais en polir l'impression.
Un message laissé à l'homme que je serai.
Comme à ceux qui voudront me connaître.

 

     

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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24 juillet 2011 7 24 /07 /juillet /2011 21:15

 

 

Bon sang, vous pourriez faire quelque chose pour arranger ce portail et cette façade ?
Accès technique, certes, du Campo Santo, mais qui ne supporte plus cette tôle ondulée !
Le Cours Maintenon se refait une beauté, le Département a parfaitement restauré
l'ancien Séminaire diocésain pour en faire un superbe lieu d'exposition flambant neuf,
et cette rue du Bastion St-Dominique, une des portes du centre historique, tout de même,
conduisant à la Place de la Révolution Française, la fontaine de la Salamandre,
et son décor de Plus belle la vie, mérite mieux que cette ambiance de casse automobile !
Il y a un an au jour près, je m'y engage, sans savoir exactement dans quoi je me fourre,
y croise Marie-Pierre Baux, toujours radieuse, qui a eu le bon goût de programmer
une certaine Vanessa Paradis, sortant de sa voiture, qui me fait l'amitié de me reconnaître.
Je suis accompagné. Je ne suis pas tout à fait dans mon état normal.
Quand une partie de moi est projetée à l'époque fantastique où je pouvais rendre service,
en envoyant à la rescousse un ami sachant lire la musique, tourner les pages de partitions,
sur scène, contre la Tramontane, au piano de Ruggero Raimondi.
Où l'on croisait Julia Migenes, Luz Casal ou Pink Martini, dans la traîne d'Olivier Gluzman.
Et, fraîchement débarqué du vaisseau parisien, je titube en ces lieux familiers,
avec le début de quelque chose, à mon bras, qui hésitait encore à me dire exactement 
à quelle sauce j'allais être mangé, quand je n'aspirais qu'à être bouffé tout cru sur-le-champ.
Je retourne des sourires, je salue, quand je dois dissimuler la tempête qui m'ébouriffe.
Et la pente de la rue, où mon coeur fait boule de neige, me précipite ailleurs, dans l'élan,
descendant dans le four d'une histoire sans trouver un quelconque moyen de freiner.
A me foutre dans le décor, de grâce ! Qu'il soit beau ! A la hauteur de l'évènement !
S'il est impossible de bâtir, couvrez au moins cette tôle de végétation !

C'était il y a un an. L'été était l'été. Juillet était un mois de Juillet. Chaud. Ensoleillé.
Et je ne tenais pas dans mon box de fortune à l'unique fenêtre sur dix mètres carrés.
Au bout de cette glissoire, savions-nous où nous allions ?
Entre deux Gitans romantiques qui chantent la sérénade jusque sous mon balcon.
Au ruisseau ? Au feuillage d'un figuier ? A la Révolution. Oui. La bien nommée.
Ignorant encore que j'allais y emménager. Que j'allais y nager quelques brasses.
Cet été pouvait-il être plus miraculeux encore que l'été 2001 ?
Le sort pouvait-il me repêcher, une nouvelle fois, au retour de mes frasques ?
Et ce au même endroit ? Autour de ce cimetière qui sait me porter chance ?
Il fallait que cet appartement soit libre. A vingt mètres de ce cloître de mystères.
Et je ne pouvais être plus près du moteur du destin.
Je ne me rappelle pas ce que nous avons commandé. Je me rappelle la commande.
Les sourires entendus du serveur, la bienveillance de la serveuse.
Et moi qui devais me concentrer pour comprendre ce qui était inscrit au menu.
Qui lisais sans lire. Qui devais bien choisir quelque chose quand je n'avais pas faim.
Qui devais tout faire pour faire l'air de rien, et planquer mon trouble sous la table.
La serveuse nous tenait manifestement déjà pour ce que nous n'étions pas encore.
Des amants. Comment pouvait-elle comprendre qu'il s'agissait d'un dîner d'amoureux ?
Quand nous ne comprenions rien ! Le désir pouvait-il lui apparaître, comme à la vue de tous ?
Quand je luttais précisément pour que le mien ne t'effraie pas, le tenir à distance...
Et qu'il était palpable, il faut croire, au-delà de la rue Fontaine Na Pincarda.

Non, vraiment, ce n'est pas sérieux. Et ce n'est pas grand-chose à faire.
Il y a quinze jours à peine, j'y retourne pour saluer une icône familiale.
Une infidélité faite à Marie-Pierre, permise parce que c'était Véronique Sanson.
La dame est au Mercure. Elle est en forme. Donne un concert qui me rassure.
Accepte que je vienne la féliciter après le show. Sur un texto de son assistante.
On me barre la route côté cloître. Je dois faire le tour, le texto comme laisser-passer,
brandi comme une plaque de police, pour justifier que je ne suis pas un maniaque.
A la barbe de fans massés devant ce merveilleux rideau de tôle, j'ouvre la porte,
et j'entre comme si c'était chez moi. " C'est Kanou qui m'a envoyé ce sms... "
Que j'avais connue il y a six ans. Qui m'avait permis de suivre jusqu'à la maison de Triel.
Je connais les lieux. J'y ai déjà traîné mon coeur. Celui-ci bat la chamade en attendant Véro.
Plus fort encore que lorsque j'entrai au Café Chic, rue du Faubourg Saint-Honoré,
pris au dépourvu, découvrant médusé la surprise préparée par un ami commun.
Elle apparaît. " J'habite au bout de la rue. Je ne pouvais pas ne pas venir ! "
Elle me signifie qu'elle a lu le mot que j'ai laissé la veille à la réception de l'hôtel.
Avec mon numéro de portable. Et la brève évocation de mon séjour chez elle.
Tous les fantômes du lieu, réveillés par Bernard'Song et Vancouver, décidément,
me sont tous favorables, et j'ai une pensée pour eux, avec mille remerciements,
chaque fois que je longe le site. Que je sorte, ou que je rentre chez moi.
Je veux bien essayer d'être rationnel. Mais, comment ne pas croire aux signes ?
Quand la vie, où que je me planque, s'obstine à venir me chercher
et me prendre la main.

Pour les fans qui attendent dans le froid.
Pour les touristes qui s'aventurent dans notre médina.
Pour les histoires d'amour naissantes !... S'il vous plaît.
Par respect pour la Funéraria, chapelle attenante qui y présente sa délicate abside.
N'est-il pas possible d'arranger ce maudit pan de mur d'un simple cache-misère ?
A la pente douce de la rue du Bastion St-Dominique. Jusqu'à la Salamandre.
J'ai tenu la distance comme au long des murailles sur une année entière.
Quand le ciel nuageux s'est ouvert sur le cloître. Sur la ville. Et ma vie en désordre.
Dévoilant des étoiles au-dessus d'un piano. Au fil de chansons repassées mille fois.
Et des heures de vol pour retourner à Rome, laissant des lettres mortes résonner jusqu'ici.
A souffler sur les braises d'une décade heureuse, qui allait tout brûler, pour retomber en cendres.
Au fil des kilomètres qu'il fallait parcourir. Egrener à l'aller, dévorer au retour.
Dans l'urgence et la soif de ne pas disparaître.
Pouvais-je imaginer, à ces tôles ondulées, dans quoi je m'engageais ?
Dans quelle révolution ? Si proche. A l'ombre du figuier et des esprits complices.
Les flammes d'un dîner à la nuit estivale. Pour faire table rase. Enfin.
Et tout recommencer.


 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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23 juillet 2011 6 23 /07 /juillet /2011 23:11

 

 

Je n'ai qu'à tendre le bras, et je pourrais toucher en face, les volets du presbytère.
Toujours fermés. Au point que j'ai pris l'habitude de garder les miens toujours ouverts.
Même la nuit. Surtout la nuit. Quand la lumière artificielle rend le décor féérique.
Au bout de ma rue médiévale, les choeurs de Carmen usent à tue-tête leur Toréador.
Enfin un concert qui n'est pas amplifié à faire tomber les carreaux de mes fenêtres.
Un Opéra. Le plus populaire sans doute. La cassette dans le magnétophone.
Je n'étais pas grand. A Toulouse. Régine Crespin. Ecoutée en boucle.
Dans le salon de la maison sur la Garonne. Chez Bon-Papa et Marraine.
Toréador, prends garde ! Il ne pourra pas dire qu'on ne l'avait pas prévenu.
L'oeuvre de Bizet se déroule dans mes garde-fous, et je me rends compte
que je connais la partition par coeur.
Je regarde le programme des Estivales - nouvellement de l'Archipel -
et me dis qu'il n'y avait qu'un Patrick Poivre d'Arvor pour sous-titrer :
" Carmen : une mangeuse d'hommes ".
A mon bureau, je ne suis pas en position pour juger de sa mise en scène.
Mais Clémentine Margaine brave les éléments avec virtuosité.
Vous étonnerais-je si je vous disais qu'il y a encore de la tramontane ?
Et sur mon perchoir, je prends les vagues d'applaudissements en pleine poire.
Le fronton brisé de la porte latérale de la cathédrale, dans son marbre blanc,
est éclairé par la guirlande d'ampoules jaunes installée dans mon platane.
C'est ce que je vois depuis mon fauteuil de bureau au moment où je vous écris.
Cette porte fermée, sous un dôme à écailles évoquant une pigne de pin,
mangée par le nuage de chlorophylle que le vent vient agacer par moments.
De ma place, je ne vois pas l'Horloge, en haut de sa tour, et sa couronne d'épines :
ce gribouillis de fer forgé emprisonnant une cloche comme du barbelé.
Tandis que nous accostons des pentes bien moins connues que la Habanera,
tunnel où ces messieurs commencent généralement à piquer du nez,
en attendant d'être réveillés en fanfare au dernier acte, aux arènes de Séville.

Séville... Mes 19 ans. Le cadavre de mon grand-père aux Tuiles Vertes.
Le retour précipité de Barcelone lorsque je devais assister le soir-même
à la répétition de la Cérémonie d'Ouverture des Jeux Olympiques à Montjuïc.
Ingrid venait de venir au monde. Un chassé-croisé. Vaudeville. Les portes claquent.
Une vie qui entre. Une vie qui sort. Bon-Papa enterré à Bompas. Une chose incongrue.
L'Espagne fêtait les 500 ans de la Découverte de l'Amérique par Christophe Colomb.
Ironie du sort : j'avais manqué les J.O. Je ne pouvais manquer l'Expo de Séville. Ole.
Laetitia Bourgeois pour nous accompagner. Et un caméscope pour tout immortaliser.
Madrid. Tolède. Cordoue. Ma terre aride de caillasse. Les couteaux. Le Greco.
Avant de fondre à la découverte de la Torre del Oro sur le Guadalquivir.
Séville... La terre d'un amour que j'allais mettre vingt ans à connaître.
Faute de voir la Giralda de McKim Mead & White au premier Madison Square Garden,
j'allais admirer l'originale, sublime, à sa place : le plus beau minaret de toute la Chrétienté.
Me perdre à Santa Cruz, comparer la Place d'Espagne aux installations de La Cartuja.
Quand Séville avait accueilli l'Exposition ibéro-américaine avant l'Exposition Universelle.
1929 décidément. L'Andalousie tenait déjà à donner le change aux Catalans,
qui organisaient une Expo à Barcelone. Et je me retiens de vous parler de New York.
Je saurai un jour ce que je faisais cette année-là. Il faut croire qu'il y eut quelque chose.
Quant à Séville, qui me prendra mes yeux sombres, me privera de l'objet chéri de mon amour,
à qui je ne saurais tenir rigueur à condition qu'elle me le rende, elle explose ici,
au Campo Santo, à force de castagnettes et d'espagnolades
pour ouvrir l'attendu quatrième acte.

Des gens sont déjà sortis de l'enceinte en commentant ce qu'ils venaient de voir.
" Non, vraiment, ça faisait trop comédie musicale... "
Je les entends depuis mon bureau, songeant qu'ils auraient mieux fait, à ce stade,
d'attendre le bouquet final, toujours aussi jubilatoire, quelle que soit la mise en scène.
Puisqu'en arrivant au sommet du drame, tous les thèmes se mêlent avec magnificence,
et qu'à quelques minutes près, ils auraient vécu en direct la mise à mort, splendide,
de la mangeuse d'hommes, donc, ce moment toujours passionnant, et surtout,
cette montée d'émotion extraordinaire, sur la plus haute note du Ma Carmen adorée,
d'un Don José, derniers mots prononcés de l'oeuvre, qui toujours, après mille écoutes,
me hérissent le poil et me font monter des larmes avec la même efficacité.
Bizet évidemment, trouve le moyen de faire couler le maquillage à la tombée du rideau.
Histoire de nous trouver embarrassés, coulants de partout, quand la lumière se fait dans la salle.
Non, vraiment, quelle que fut l'étrangeté de la mise en scène, son indigence ou sa vulgarité,
on ne se tape pas le troisième acte en entier si ce n'est pas pour arriver enfin à ce feu d'artifice !
Sans l'image, j'assiste de ma place à ce final tauromachique, attendant fébrilement
cette fameuse dernière phrase, sachant d'avance qu'elle va me perforer la poitrine.
Et la voix d'Eric Salha m'a mis à mort, comme prévu. Quand ma poitrine il perfora.

Ce ne sera pas la première fois, mon amour, que tu franchis les montagnes sans moi.
Ce ne sera pas la première fois que tu t'absentes, que tu t'éloignes de notre écrin de vignes.
Mais plus que la distance, je redoute la durée. Et ferai de mon mieux pour ne pas en souffrir.
Je ne suis pas Don José, et ne veux posséder personne. Pas même la personne que j'aime.
Quelle est cette peur panique de l'abandon qui pousse l'humain aux pires extrémités ?
Je n'ai pas peur que tu m'abandonnes. J'ai peur que nous ne nous aimions plus.
Et je n'ai peur de rien, pas même que ça finisse, si nous nous aimons toujours.
La séparation est inéluctable. Tôt ou tard. La dernière option étant celle de la mort.
Et je parle ici de la mort naturelle. De la mort de vieillesse. Dans le meilleur des cas.
Même si nous ne nous quittions jamais, la Mort se chargerait un jour de nous séparer.
C'est donc à cette perspective que je me prépare, cherchant un moyen de déjouer la logique,
de contourner cet obstacle, le plus implacable de tous, et, après douze mois de réflexion,
j'en reviens toujours à la même conclusion : si nous nous aimons, même la Mort ne peut rien.
Observant que je continue à aimer les êtres disparus avec la même ardeur et la même émotion.
Ainsi, rassuré à propos de cette séparation pour le moins définitive, je ne peux décemment pas
m'inquiéter de séparations subalternes, secondaires, dérisoires, devenues ridicules.
Et je ne peux plus paniquer à l'idée de ne pas te voir quinze jours, en étant si serein sur l'éternité.
Résoudre le problème ultime était le plus difficile. Le reste, c'est de la rigolade.
La solution tient à la sincérité de nos sentiments, à leur force, à leur constance,
et à la confiance que nous nous accordons. Aussi fragile qu'indestructible.
La foule quitte le Campo Santo, après un tonnerre d'applaudissements, proche de l'ovation.
Je ferme les fenêtres et vais me coucher. Je vais m'étendre. Je vais t'attendre.
Je serai avec toi dès que j'aurai les yeux fermés.
Et dès que je les ouvrirai.
Ole.



 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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22 juillet 2011 5 22 /07 /juillet /2011 15:27

 

 

Le mauvais temps n'est pas une mauvaise affaire pour tout le monde.
Les restaurants du centre-ville font le plein. De tous les touristes privés de plage.
Les Jeudis de Perpignan ont commencé hier soir.
Et mon appartement, en son lieu stratégique, est dans la grosse caisse de l'orchestre.
Festival International de Carillon, Estivales de l'Archipel... je suis à la croisée des ondes.
Une famille anglophone m'arrête au parc, pour demander son chemin, plan en main.
Plus loin, Quai Vauban, on parle russe et chinois. La globalisation a du bon.
Si tu voyais notre petite ville aujourd'hui, maman... comme tout a changé.
La gare TGV, le nouveau théâtre, signé Jean Nouvel, et son Grenat, sur le Marché de Gros.
La fontaine lumineuse au bout de la voûte de platanes du Cours Palmarole,
qui me renvoie à la perspective magique du Palais National de Barcelone,
et à l'excitation indicible d'avant le parc d'attractions de Montjuïc.
La métamorphose avait commencé avant mon départ, il est vrai.
Quand j'avais assisté à la destruction du parking République,
au réaménagement de la place Arago, et à la colorisation des façades,
gagnant tout le centre historique comme une traînée de poudre.
Depuis Paris, un séjour m'a permis de constater la rénovation du Cinéma Le Castillet.
Un autre, de découvrir celle de Notre-Dame des Anges à l'ancien Hôpital Militaire,
ou le développement des immeubles de l'Espace Méditerranée sur la rive sud de la Têt.
Et, depuis mon retour, je suis résolument séduit par ce qu'est devenu ma ville natale.
C'est toute l'agglomération qui s'est développée, accueillant des gens de partout.
Et l'idée de conserver des coulées vertes, entre Perpignan et les villages alentour,
justifiant le concept d'Archipel, n'est pas seulement dans l'air du temps.
Elle garantit l'identité de chaque commune, essaie de contenir l'effet désastreux
des villes dortoirs déshumanisées, en cherchant à garder un pied dans le passé,
le patrimoine historique - quand il y en a un - et des emplois, autant que faire se peut.
Réussite pour des villages comme Baixas, Rivesaltes ou Torreilles.
Enfin connectés au Castillet par un réseau sérieux de transports en commun.

Je n'entre pas dans les considérations politiques.
Je sais que le Département fait beaucoup aussi pour ce pays.
Quand, naturellement, le Conseil Général et l'Agglo ne sont pas du même camp.
Que cela doit bloquer nombre de projets ou ralentir des mesures de bon sens.
Mais il semble que les choses se fassent tout de même en bonne intelligence.
Le Département pouvant déployer ses forces sur ce qui n'est pas géré par l'Agglomération.
Il s'agit d'aménagement du territoire. Et il est, en Roussillon, un indiscutable succès.
Mes amis, pour certains, de bonne ou de mauvaise foi, s'étonnent de mon enthousiasme,
préférant minimiser les progrès et rester dans l'idée que nous sommes des arriérés.
Que Perpignan est un trou où il n'y a rien à faire. Maîtres dans l'art de l'auto dénigrement.
L'occasion bien sûr, de régler leur compte à tous les politiques locaux, incapables,
tricheurs, menteurs et corrompus, quand les choses ne vont jamais assez vite,
ou que l'on s'obstine à ne voir que le verre à moitié vide.
Mais l'avantage du fils prodigue est qu'il n'a pas vécu la mutation au quotidien :
la distance de cet oncle qui ne vient qu'une fois par an, et qui s'étonne de voir
combien les enfants ont grandi, quand nous ne le voyons pas forcément nous-mêmes,
au jour le jour, pour être le nez dans ces révolutions lentes et de longue haleine.
J'ai l'avantage aussi, sur les touristes ou les enfants du pays de passage,
d'être revenu m'installer, et d'avoir ce temps nécessaire pour comparer le quotidien actuel,
avec celui d'il y a dix ans, quand il faut trouver un appart, se déplacer, faire ses courses,
trouver du boulot ou occuper ses loisirs.

J'avais connu Visa bien sûr, et les Estivales, à l'époque glorieuse de Marie-Pierre Baux.
L'arrivée de la FNAC, comme un signe de développement, au moment charnière
où internet n'avait pas encore totalement compromis sa domination commerciale.
Connu plus tôt encore, la période faste du Mex, qui fut une référence pour les noctambules.
Mais, dès que j'avais le dos tourné, pour aller boire mon whisky au Québec,
pour vivre mon histoire d'amour à Barcelone, satisfaire mon éditeur à Paris,
des fleurs inattendues poussaient dans le cayrou de ma ville.
La Casa Musicale, avec Ida y Vuelta. El Mediator, et le festival TILT.
Prenant le relais des festivals du Disque, Jazzèbre ou Aujourd'hui Musique.
Je le découvre, au zèle de Daniel Tosi, il faut désormais ajouter celui d'Alex Augé,
qui fait jouer Billie Jean ou Seven Nation Army à la Cobla Mil.lenaria.
Quand la ville entière met un point d'honneur à malaxer l'héritage culturel catalan.
Qui n'est plus figé dans une Semaine Sainte poussiéreuse,
ou une fête de la St Jean sans imagination.
Alexandre et Fabrice Rieu mettent des bulles dans le Muscat de Rivesaltes,
distribuant leurs Bubbles dans les discothèques, et, comme une suite logique,
même la Procession de la Sanch devient tendance.
Vraiment, je t'assure, maman... tu ne reconnaîtrais pas Perpignan.
Où le musée Rigaud va trouver son entrée XVIIIème, au portail de l'ancien Conservatoire.
Où la Casa Xanxo est enfin ouverte au public. Comme la Chapelle du Tiers-Ordre.
Où la Poudrière a été rénovée. Comme la bâtisse de la superbe Maison de la Catalanité.
Après Charlotte Julian sur les quais de la Basse, c'est Cali qui tourne un clip au Campo Santo.
Quand l'Université s'est ouverte à de jeunes Chinois.
Et que le rugby nous frotte aux Anglophones.
Des Îles Britanniques comme de l'Hémisphère Sud. Puisque l'USAP, ici, est plus qu'une fierté.
Un moteur économique. Derrière l'émotion d'un peuple chantant L'Estaca d'une seule voix.
Et les Néo-Catalans ne sont plus seulement toulousains, maghrébins, ou du Nord de la Loire.
Venant toujours plus nombreux, et de toujours plus loin.

Depuis La terre est rouge, je l'écris, bien des choses ont changé.
Je devrai revoir ma copie. Je devrai l'actualiser. Quand la fièvre est intacte.
La distance atlantique avait grossi le trait. Comme la souffrance à vif de t'avoir enterrée.
Aujourd'hui, le prisme d'un amour fou, solaire et merveilleux, peut avoir cet effet,
en effet, de tout transfigurer, embellir, amplifier...
Mais je crois être objectif, quand je découvre ce qui est fait au domaine Dom Brial,
dans l'Anse de Paulilles, comme le raccordement volontariste, au Sud, au reste du Pays,
pulvérisant la frontière dans une irrépressible réunification de la Catalogne.
Toujours aussi loin de Paris. Toujours plus près de Barcelone.
Et je rends hommage à tous ceux qui ont créé ici. Des entreprises. Des festivals.
De nouveaux concepts. Des tissus sociaux au terreau d'un formidable multiculturalisme.
Tout un cocktail à l'opposé de l'image de la ville de province aussi inerte qu'ennuyeuse.
Si tu voyais cela, maman, comme tu serais fière, les yeux fermés, le nez au vent...
Des soirées au Bar Celone, aux Vins 4 Canons, aux Jeux d'Hiver.
Des bars et restaurants qui ont réhabilité les rues du Théâtre ou des Cardeurs.
De St Assiscle, relié à la ville par un immeuble cuivré de Dominique Perrault.
De la foule entre le Castillet et le Palmarium venue pour une St Jean digne de ce nom,
ou l'arrivée du Bouclier de Brennus dans les couleurs chaudes de notre drapeau.
Si je suis amoureux, je suis un fils fidèle. A la Fidélissime. Où je reviens toujours.
Le mauvais temps fait son temps. Sur nos Îles Baléares. Nos îlots balnéaires.
Tout n'est que de passage à la ville frontière.
Si je le suis aussi, je veux rester un peu...

   

 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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20 juillet 2011 3 20 /07 /juillet /2011 18:00

 

 

Les agents de la Police Municipale de Perpignan
m'ont, j'en ai bien conscience, regardé d'un air soupçonneux.
Il faut dire que j'étais revenu sur les lieux du crime. Façon de parler.
J'ai traversé Bir Hakeim, par ce passage bordé de superbes palmiers.
J'avais gardé Jules et Lola tout l'après-midi et rentrais chez moi.
A un jet de pierre de la cabine téléphonique. J'ai fait le détour.
Le Park Hotel. La Place Molière. Donc. En avoir le coeur net.
J'ai ignoré les trois garçons dans leurs uniformes, restés devant leur véhicule,
et me suis dirigé direct sur la cabine, avant de me lancer...
Il s'agissait pour moi de compter les pas.
Entre l'endroit où tu trouvais, et celui où j'étais, à l'opposé de la place.
Celui où, te tournant le dos, alors que je marchais avec autant d'empressement,
j'ai saisi mon portable dans ma besace pour te répondre.
J'entends : " Je suis à la cabine téléphonique "...
Je me retourne, et je t'aperçois. Demi-tour. Et je viens à ta rencontre.
50 pas. C'est ce que j'ai compté devant les agents perplexes.
J'ai refait les 50 mètres qui me séparaient de toi. Durant lesquels j'ai chaviré.
Attiré comme un aimant. Conscient de cette force inattendue qui m'avait embrasé.
Buisson ardent. Je me suis consumé. Comme Johnny La Torche des 4 Fantastiques.
Ebloui par ton sourire ténébreux, je suis venu m'y coller comme un oiseau contre la vitre.
Pong. Sonné. Les policiers me regardaient faire les bras croisés.
Un. Deux. Trois. Quatre. Cinq. Six. Traversée de la place. De part en part.
Et, comme ce jour-là, je me suis sauvé. Oui. C'est cela. Le long des remparts.

Evidemment, ce jour-là, il y avait ton avant-bras pour effleurer le mien.
Dans notre marche paniquée, sur le trottoir, en direction du centre-ville.
Ici, un an plus tard, un an après les faits, je n'ai pas d'escorte. Je rentre chez moi.
Avec ce chiffre en tête. 50 mètres. L'onde de choc. De ton sourire.
Un an après, la place sent encore le brûlé. Les platanes ne s'en sont pas remis.
Quant aux agents, ils ont dû considérer que je devais avoir une bonne raison
d'esquisser ce pas de danse étrange, en diagonale, ou de prendre des mesures.
Le mois de juillet peut être pourri. J'ai le coeur léger. Haut de plafond.
Et malgré quelques turbulences passagères, mon bonheur ne s'est pas abîmé.
Je me suis excusé ailleurs, de n'avoir rien d'autre à raconter, mais c'est ma vie.
Toujours obsessionnelle. Ma vérité. Mes trois dimensions. Sans limites.
Ce à quoi je reviens toujours pour supporter l'ordinaire ou le quotidien.
Certes, j'ai oublié de parler de Fanny Ardant, avec qui je fume une cigarette,
aux Bouffes du Nord, dans les loges en sous-sol, avec Cécile et Lambert,
allongés dans les canapés d'un campement de Touaregs.
Comme j'aurais pu parler aussi de Carole Bouquet, quand il m'a été donné
d'approcher quelques-unes des plus belles femmes du monde.
Et de vivre une existence Rock&Roll, avant de m'enliser dans la déroute.
Mais à ces 50 mètres, je me suis aperçu que ma vie gardait sa trajectoire,
d'imprévus, de sublime, de miracles, d'aventures, de flamboyances
et de merveilleuses catastrophes.

Comme j'ai eu de la chance. Comme j'en ai aujourd'hui.
Et comme je suis reconnaissant d'avoir encore, de bonnes raisons d'être reconnaissant.
Comme la vie me gâte. D'être encore vivant. D'être encore capable de m'émouvoir.
De pouvoir te voir te poster dans ma porte grande ouverte, avec cet air un peu gêné.
Cette silhouette embarrassée qui semble toujours attendre un signe d'encouragement.
Que je m'empresse de renverser dans la blancheur du drap pour allonger notre aubaine.
Je n'avais depuis longtemps, aussi peu bougé dans l'espace.
Quand je n'avais jamais été autant dans le mouvement qu'aujourd'hui.
50 pas. C'est bien peu de choses. Quand ça m'a mené loin.
Au-delà des tropiques. Des dernières frontières. Au-delà du plafond.
Au-delà des remparts. Des lignes d'horizon. Et du monde terrestre.
L'ancien Cours Maintenon m'offre un galbe érotique. Qui me fait de l'effet.
Qui me fait tant sourire. Et me fait aimer le vent.
Les ondes à la radio, ont relayé l'ampleur de ma béatitude.
Quand je dis à quel point, à qui veut bien l'entendre, l'amour sauve de tout !
De l'absurdité du monde, de la torture du temps, des problèmes d'argent,
d'essence et de santé, de la peur de mourir, de l'enfer d'être seul.
Peu importe qu'il soit réciproque. Ce qui sauve, c'est d'aimer.
Nous ne sommes plus dans une logique consumériste ou comptable.
Nous ne sommes plus dans le donnant-donnant. Oeil pour oeil. Dent pour dent.
Nous sommes dans l'oubli de l'orgueil, l'oubli des apparences, de la fierté nuisible,
de l'idée que l'on mérite quelque chose, que l'on vaut tant, ou que l'on vaudrait mieux.
Il s'agit de s'ouvrir sans demander de comptes. Aimer les choses pour ce qu'elles sont.
Et l'on gagne à donner. Sans exiger quoi que ce soit en retour. Sans en avoir l'intention.
Quand le plus beau salaire est celui d'être heureux, d'être bien. Sans n'attendre rien.
De rien ni de personne. Quand il est aisé, alors, de n'être ni frustré, ni déçu.
Et que le bonheur, ici, n'a pas de conditions.

Mes amis, le bonheur, c'est maintenant.
A l'instant où vous lisez ces lignes. Vous qui êtes vivants pour le faire.
Avec ce que vous avez. Et ce que vous n'avez pas. Quand le bonheur, c'est d'être.
Oubliez le faire. Oubliez l'avoir. Dont vous n'aurez plus que faire une fois dans la tombe.
Votre richesse c'est d'être là. Votre chance. Votre privilège. Votre force.
Ce n'est pas pour demain. Ce n'est pas autre part. C'est là où vous êtes.
On peut vendre l'idée, que vous serez heureux avec un bon mariage, un couple qui fonctionne,
une grande famille et une cuisine équipée. Avec telle automobile. La maison de campagne...
Le temps est trop précieux pour le gaspiller à attendre. Soyez heureux maintenant.
C'est plus prudent, et ça ne coûte rien. Il vous suffit de le décider.
L'argent n'existe pas. La gloire est relative. Et le temps est compté.
Vous êtes vous-mêmes. Et doués du libre arbitre. Il suffit de décider.
Quand tout est extraordinaire. Quand tout est hallucinant. Quand tout est fantastique.
Zoom arrière. On prend de la hauteur. Au-dessus de la ville. Hors des cadres sociaux.
Et l'on voit mieux le monde, comme on se voit soi-même, au milieu du miracle.
Fermez les vecteurs de propagande qui vous expliquent que vous avez besoin de ça.
Cosmétiques. Traitements. Régimes alimentaires. Look. Mode de vie. Et j'en passe.
Vous n'avez besoin que de vous-mêmes. Tels que vous êtes.
Dites-vous que vous ne valez rien. Et que rien ne saurait vous valoir.
Nous sommes au-delà des valeurs. Nous sommes.
Et c'est le reste du monde qui a besoin de nous.

Jules, Lola et moi avons bien ri. Nous avons joué au monstre.
Nous avons ri au point de déranger le sommeil de Marette, la chatte de la maison.
Nous nous voyons demain. Ce sera un plaisir. Puisque nous allons nous retrouver.
Et nous jouerons encore à aimer avoir peur. Et aux sensations fortes.
Je rentre le coeur léger. Il n'y a plus de distances. Entre moi et les autres.
Entre moi et ton corps, que j'attends sans l'attendre. Quand je l'ai avec moi.
Comme vous êtes avec moi. Quand nous formons un tout. Une bambouseraie.
D'un seul organisme. D'une même matière. Aux vérités multiples.
Une part de vous-même, était à Perpignan, à longer des palmiers,
à recompter les pas, sur un lieu de naissance, entre vous et le monde.
C'était il y a une heure. C'était il y a un an. L'instant où je l'écris.
L'instant où vous lisez. Puisque le temps, aussi, est toujours façonnable.
Géométrie variable. Ou relativité. Qu'y a-t-il hors de nous ?
Je ne suis sûr de rien.
Il y avait des agents. Que je n'ai pas rêvés. Il y avait des platanes. Il y avait des palmiers.
Il y avait ton regard. Il y avait ton sourire. Moins de 50 pas. De ta main à la mienne.
J'ai traversé ton corps. Traversé ton histoire. Pour n'avoir d'un iota, changé de trajectoire.
Ma peau n'est pas étanche. N'est pas imperméable. Je fais partie de toi.
Je fais partie de vous. Et dans mon élément, je m'ébroue dans les vagues.
Je suis heureux. Debout. Je joue avec ma bague. Et avec les nuages.
Perpignan est partout pour qui veut bien y être.

 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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19 juillet 2011 2 19 /07 /juillet /2011 17:48

 

 

Le talon. Le coup de pied. Et sa plante. La cheville.
Je bricole. Au départ du mollet. Au genou. L'intérieur de la cuisse.
Je furète. Je m'active. Je m'affaire. A la fesse. A la hanche.
Au pubis. Au nombril. Je cherche quelque chose. Aussi fort que l'on puisse.
La salive. Les baisers. Que l'on sème. Et ça bruisse, ça clapote, ça frémit.
Mes dix doigts. Mes deux bras. Mes deux jambes. Tout est mobilisé.
A ta peau. A ton souffle. A ton corps. Ta chaleur. La moiteur. La sueur.
L'impudeur. Le désir. La rudesse. Et la délicatesse. Le plaisir est permis.
Je me lève. Temps mort. La distance. Le tour du ring. On se reprend.
La nudité, sur mon lit, offerte, de la silhouette la plus érotique du monde.
De cette chair vibrante, à dévorer comme cuisse de poulet au Moyen Âge.
Prédateur. Carnassier. Je n'en ferai qu'une bouchée. Attendri au regard.
Mon coeur comme ma verge : intérêts convergents. Toi qui concentres tout.
Je veux que tu chavires. Que tu perdes le sens de l'orientation. La raison.
Qui est Président de la République ? Que tu oublies ton prénom. Le rivage.
A tes tétons. A tes aisselles. A tes épaules. J'inspecte le moindre centimètre carré.
Je l'étudie. Je l'envisage. Je le caresse. Le passe au test. De la pression. Du titillage.
A l'outillage. Je cloue ma langue. Dévisse mes poignets. Je ponce et je décape.
Le moindre spasme, la chair de poule, la moindre convulsion, tout m'encourage,
la crispation, la contraction, respiration, comme autant d'indications sur ce qu'il faut,
sur ce que je peux abandonner, sur ce que je dois approfondir. Tout s'échappe.
La vapeur. Les toxines. La tension. La pulsion. L'émulsion. Et l'orgasme.
Et l'orgasme. Et l'orgasme. L'orgasme...

Qu'il est beau ce plafond que nous avons crevé.
Qu'il est beau ce plafond que je regarde sans le regarder.
Qu'il est beau ce crépi qui s'envole en fumée. A l'ombre des volets. Presque fermés.
Côte à côte. Ereintés. Epuisés. Moulus. Piétinés. Exténués. Roués de coups.
Le calme après l'apogée. La tempête a sombré. La lumière tamisée. Anisée.
Le cendrier sur l'eau. Entre deux nappes de sperme. Quand c'est une mer d'huile.
Où j'ai ta main inerte, pour reprendre mon souffle. Aux brumes des labours.
Que je porte à mon torse. Dans le poil de mon torse. Pour réamorcer mon coeur.
Qui repart sous l'écorce. Remonte à la surface. Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime.
Remonte sous mes paupières, au regard qui revient dans mes yeux.
Que je tourne vers toi pour pénétrer les tiens. Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime.
Comme une pulsation. A mes tempes. A mes poignets. A mon cou.
Cigarette envolée. Dans la lumière éteinte. Et les ombres confuses.
Où je te vois bien mieux, qu'en pleins phares, sous les flashs de la foudre.
C'est une intimité, à nulle autre pareille. L'intime de l'intime. Sous la lune diffuse.
Quand la nuit ensoleille, l'ensemble de la chambre, et deux êtres alanguis.
Un baiser fourbu, où l'on échange ce qu'il nous reste de forces.
Tout aussi voluptueux que les plus fougueux qui l'auront précédé.
Côte à côte. En fumée. Ecumants. Pulvérisés. Atomisés.
Nous nous reconstituons dans les yeux l'un de l'autre.

 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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13 juillet 2011 3 13 /07 /juillet /2011 14:43

 

 

La victoire de l'Espagne. Les drapeaux sang et or.
Un message mal rasé, via les pages Facebook.
Et le monde a basculé, rue Alfred de Musset.
Le poète syphilitique, comme frère d'infortune.
A donné son nom à cette rue, ici, à l'ombre des remparts.
Où j'étais venu m'échouer, jeté par la fenêtre, au bout d'une ligne ferroviaire.
Le pavé de Paris, débarrassé de mes godasses, de mes errances alcoolisées.
Le boulevard Jean Bourrat, ce n'est pas Rivoli, ni les Champs Elysées.
Une pente arborée pour aller à ma chambre.
L'ordinateur ouvert, sur le monde connecté, au-delà de la grille.
A ma fenêtre haute, de lumière et d'espoirs médusés.
L'Espagne est championne du monde. L'euphorie dans la ville.
C'est à peine la France. C'est déjà l'Empordà. Il y a le sang. Il y a l'or.
Quand les Catalans, cette fois, s'unissent à la Castille.
Mon Espagne de lait. Mon Espagne de sang. Enfin réconciliées.
Le temps d'une victoire. Mon pays peut briller. Et ma fierté éclore.
Ma fenêtre d'alors n'est pas celle du mur, ouverte sur la rue,
mais celle sur mon bureau, qui me fait découvrir des portraits incongrus
d'une foule d'amis d'un monde virtuel, où un profil, soudain, m'a sauté au visage.
La photo noir et blanc, d'un être sang et or, au regard qui semblait m'avoir déjà choisi.
J'y repense, mon amour. C'était il y a un an. L'histoire d'un autre âge.
Le message assuré. La bouteille à la mer. Notre première page.
Et j'entends les klaxons, et les cornes de brume.
Les cris de joie de gens, assis sur des portières, brandissant des drapeaux.
Et mon trouble à te voir, dans ma chambre, sur l'écran, ton regard sur ma peau.
Réalisant qu'à Paris, j'étais au bout du monde, quand tu vivais ici.
Que je n'étais rentré que pour te rencontrer.

Je m'étais permis de t'écrire ce mail, pour des raisons purement artistiques.
Il s'agissait de travail. De quoi d'autre ? De simple curiosité.
Histoire de me présenter, de créer le contact, provoquer la rencontre.
Et ta voix, assez vite, s'était voluptueusement enroulée dans ma boîte vocale.
S'est glissée dans mon oreille. Pour me hérisser le poil.
Me caresser des parties du corps éloignées de mes tempes.
Et ma vie, tout à coup, je l'ai su aussitôt, courait contre la montre.
J'ai harcelé ma messagerie. J'ai écouté en boucle. Pour être sûr d'avoir bien compris.
On m'accordait un rendez-vous. C'est bien ça ? On pouvait prendre un verre ...
A Perpignan aussi, la neige avait fondu. Nous étions en été. Le vent avait tourné.
La cellule n'était plus un placard à balais. Mais un observatoire, une planque discrète.
La pièce cachée, derrière une glace sans tain, pour préparer des manoeuvres historiques.
J'allais vers un destin, me confronter à toi, à tes yeux, à la foudre,
avec l'assurance de sortir d'un toril, pour en avoir le coeur net, en crever, en découdre,
dans l'arène de la Place Molière, où j'allais, à coup sûr, être carbonisé.
Derrière le Park Hotel est un nouveau sanctuaire.
Où j'aime revenir, comme sur les lieux du crime, retrouver la cabine,
les bancs, les arbres, entre autres témoins muets, complices de la combine,
qui nous ont vus émus de nous voir et savoir, dès le premier regard,
que l'affaire était faite.

Cette nuit, la dernière, à un an d'intervalle,
un orage sur la ville est venu faire la fête, s'est invité à cet anniversaire,
chassant les spectateurs des gradins d'à côté, sortant par rangs entiers en riant,
en courant, évacuant le somptueux cimetière, ou le cloître béni où j'avais, il y a dix ans,
déjà pris la foudre, il est vrai, sur la tronche, et mon nez paratonnerre.
Je rends grâce au ciel, tendu sur la volière coiffant le clocher de St Jean,
d'avoir pensé à nous, et de nous célébrer, avec autant d'effets apocalyptiques,
aussi sonores que pyrotechniques, à la hauteur, en somme, de ce que nous vivons.
Ce fut la fin du monde. Du monde d'avant toi. Et tout pouvait brûler, au bûcher,
comme Sodome et Gomorrhe, dans un grand feu de joie. Je n'en regrettais rien.
Aux balustres de marbre de l'escalier monumental couché sur les remparts,
sous la lune, je pouvais contempler l'incendie en jouant de la lyre et chanter,
comme Néron devant Rome, ivre de révélations et de révolutions,
victorieux et sauvé, racheté à bon prix, purifié, libéré, sous une voie lactée.
Les étoiles plantées au Mont des Oliviers, Minimes et Poudrière,
pour tout faire sauter. Nettoyage par le vide. Ou bien la Rédemption.
Rez-de-chaussée, au coin de Bir Hakeim. Point de chute. Point de départ.
Tu me trouves. Me relèves. M'accompagnes le long des remparts.
Pour me hisser à l'étage d'une nouvelle garçonnière. Où j'ai aimé t'aimer.
Et dont tu as la clé. De St Jean à St Pierre. Et dont tu es la clé.
La serrure et la porte. La rampe de l'escalier. Et sa minuterie.
Les tomettes bruyantes. Et les murs boursouflés. Les volets à repeindre.
Et les deux garde-fous aux losanges rouillés. Sur la lumière orange.
Où j'ai aimé t'attendre. Pour être toujours ensemble. Où j'ai aimé t'étreindre.
Pour ne plus nous quitter.

J'ai sué sang et eau, au Québec, à New York,
couru comme un canard sans tête, entre Paris, Barcelone,
usé le sang et l'or, de l'Espagne, de Toulouse, dans tous les labyrinthes.
Cherché jusqu'à Montmartre, un endroit où rester, sans me sentir pas bien.
Pour me débarrasser de ces démangeaisons, dans mes bras, dans mes jambes,
j'ai sauté dans un taxi, pris des bus, des avions, où nos âmes s'éreintent,
pour traquer le bonheur, avec la rage de vaincre, ou celle du chasseur.
J'ai perdu sang et eau à chercher ton visage. A rêver ton sourire.
Qui m'attendaient tranquilles sur le quai du départ.
Je n'arrive pas trop tard. C'est ce qui est magnifique.
Le timing inconnu fut au poil respecté. Et les circonvolutions, nécessaires,
faisaient partie d'un plan, que seul le temps, mon ami, pouvait nous révéler.
Pour une fois dans ma vie, je suis parti à point, et arrivé à l'heure.
J'en ris sous les éclairs, au soir anniversaire, où la vie pleut à verse.
Quand tout le sang versé, aux combats dépassés, m'ont fait gagner ton corps,
tout l'or de l'Amérique, celui de la victoire, olympique, ibérique, extatique,
de l'amour sans limites, que personne ne mérite, et que nous méritons tous.
L'orage sur mes épaules, à mes cheveux de paille, m'irradie de plaisirs inédits,
où la fidélité n'est plus une contrainte, mais la condition du vertige.
Barcelone et Madrid. Enfin réconciliées. Le lait avec le sang.
Le sang de la révolte. Et l'or des cathédrales. Un pays. Enfin réunifié.
L'enfance et l'avenir. Ensemble. C'est le présent. L'instant d'éternité.
Où les contraires s'embrassent. Où nous sommes immortels.
Au lieu où je suis né. Où je viens de renaître.
Et ne veux plus mourir.


 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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12 juillet 2011 2 12 /07 /juillet /2011 22:28

 

 

 

Mon coeur saigne du nez.
 

 

 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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10 juillet 2011 7 10 /07 /juillet /2011 22:19

 

 

C'est un prisme magique. Et à travers lui, je redécouvre le monde.
Des lunettes de vue. Des carreaux grossissants.
Qui ne déforment pas la réalité, quand ils me la révèlent superbe.
Telle qu'elle est. Bouleversante de beauté. La réalité du monde.
Allongé sur la banquette du salon marocain, dans la cour, sous la lune.
J'ai ce filtre sur les yeux qui n'en est pas un.
Qui, au contraire, déshabille mes yeux de tous les voiles culturels,
de tous les films historiques, de toutes les moustiquaires.
Les pupilles débarrassées de tout ce qui m'empêchait de voir.
Les étoiles par millions, par milliards, dans le ciel qui m'attire.
Quand de la cour de la villa, je bascule dans l'univers, je plonge dans l'infini.
Découvre qu'il n'y a pas une surface plane, ni même une voûte,
mais des perspectives vertigineuses, pour des milliards d'années,
de brasses en apesanteur, de voyage dans le vide, entre les astres,
les galaxies et leurs révolutions.
Et je vois la taille relative de notre Terre, la courbure de l'horizon,
et son matelas d'atmosphère où glissent des avions volontaires.
La lumière dans l'olivier, près de moi, me donne une échelle de grandeur.
La conscience de la distance. Entre moi et le reste. Entre nous et l'espace.
J'ai éteint toutes les lumières. Pour laisser crépiter la nuit.
Laisser éclater le brasier céleste qui couvait sous l'éclairage artificiel.
J'y découvre une vie qui fourmille. Des lucioles qui grouillent.
Des lueurs qui clignotent. Et d'autres qui se déplacent.
Los Angeles, la nuit, avant l'atterrissage.
Je vois ton nez, et la Grande Ourse. Je vois un sourcil. Je vois tes yeux.
Le noir de tes cheveux. Constellé d'explosions nucléaires. De soleils en pagaille.
Et ton sourire... A faire pâlir la lune elle-même.

A travers le prisme, je redécouvre tout.
La splendeur de cet arbre. L'immensité de la mer.
Avec les yeux d'un enfant qui grandit, qui s'étonne.
La beauté de la nuit. L'émotion de l'aurore.
La lumière qui s'amuse dans le feuillage du platane au soleil déclinant.
Le miracle de l'eau. Sous toutes ses formes. Qu'elle soit glace. Qu'elle soit neige.
Ecumante et liquide au robinet d'en haut. Sous forme de vapeur, de nuages.
Ou dans mon corps vibrant. Aux décharges électriques.
La splendeur de la roche. De la vie animale. De ce que l'on voit. De ce qui est invisible.
De ce monde mouvant, qui m'émeut à l'extrême, fait de forces contraires,
d'imperfections parfaites, dont le tout, cohérent, magnifique, dépasse l'entendement.
Le filtre de mes larmes fait vaciller les lignes et les contours, de ce que je vois, grâce à toi.
Dont j'ai le visage en tête. A toute heure. Eveillé. Endormi. Concentré. Ou absent.
J'ai ce regard aimant, qui m'attire vers la vie, me ramène où je suis, avec vous, ici-bas.
Ce visage parfait, posé sur mes rétines, ne saurait m'aveugler quand il me rend la vue.
C'est le prisme d'amour, me reliant au milieu, au cosmos, à la terre et au ciel,
à cet environnement comme à mon entourage.
Peut-être n'étais-je pas mort. Peut-être ne savais-je plus regarder. Simplement.
Ni goûter. Ni toucher. Ni sentir. Ni entendre. Plombé par la fatigue, ou l'habitude.
A travers ton visage, que j'ai sans cesse en tête, je vois tout, je vois mieux,
et j'aime être amoureux.


 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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9 juillet 2011 6 09 /07 /juillet /2011 13:11

N

 

 
Son corps dessine la lettre N, adossé à une bitte de marbre, sous mon platane.
Ce n'est pas une bitte d'amarrage, mais un dossier de fortune, le cul sur le pavé.
Un endroit à l'ombre, où il fait frais.
Les pieds dans des sandales. Hippie ou pèlerin. Dreadlocks et barbe roussie.
Il a lâché son bâton de marche. Ne fait pas la manche. S'est arrêté ici.
Les pieds dans des sandales, au pied de la cathédrale, son corps dessine un N.
Les genoux relevés, il ne travaille pas ses abdos, il écoute quelque chose.
Les doigts dans les oreilles. Ou ne veut rien entendre.
On ne sait pas son nom. On ne sait d'où il vient. On ne sait où il va.
Un N de passage. Une vie dans le marbre. A la barbe de Dieu.
Il sent la solitude. Il sent le dénuement. Il sent l'épuisement.
Je le vois, derrière les barreaux... Il sent la liberté.
 

 

 

 

 

Philippe LATGER
Juillet 2011 à Perpignan

 

 

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Lectures

 

 

Stéphane Facco  Stéphane Facco 

 

Lambert Wilson  Lambert Wilson 

 

  Contes du Jour et de la nuit

      Véronique Sauger     

 

Lettres à ma ville

  (spectacle des Estivales juillet 2000) 

 

 

  publication chez Soc&Foc 2012 

La terre est rouge

 

interview la terre est rouge

 

 

 

 

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