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10 octobre 2012 3 10 /10 /octobre /2012 10:18

 

Le brouillon s'amoncelle.
Couvert d'un gribouillis noir convulsif qui déroule ses frises.
Des flèches et des renvois. Des ajouts. Des oublis. A l'envi.
Le papier recyclé. Exploité sur toute sa surface. Mémoriser par la main.
Des règles d'orthographe. Des formules mathématiques. Des dates et citations.
Le cerveau situé en bout de ligne. Au bout du bras. De l'épaule. Directement.
Du stylo au cortex. L'information circule. Qu'il faudra classer. Archiver.
Dans ce qui est une ruche.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 20:34

 

 

Tu ne diras pas " va-t'en ". Je reste.
Je jure sur ma mère. Et toi sur tes enfants.
Tu ne diras pas " va-t'en ". La peste.
Au cimetière des éléphants.
Puisque nous sommes fidèles.
Deux lignes parallèles.
Pour être confondues.


   

 

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 02:09

 

 

La porte barrée à moitié par un monceau de neige.
Je l'ouvre et trouve l'obstacle à hauteur de ceinture.
Comme si je l'avais ôté de son moule, la tranche est parfaitement plane.
Elle avait épousé le bois du battant sur ses gonds. Un beau travail de plâtrier.
L'escalier enroulé contre la façade avait disparu sous la meringue immaculée.
D'abord émerveillé par l'épaisseur de la couche, une idée vient me faire rire aux éclats.
Comment vais-je sortir de chez moi ? Moi qui n'ai pas de pelles comme tout Québécois.
C'est un matin d'hiver. J'avais senti la veille que le froid reculait. Que l'air s'adoucissait.
Lorsqu'il faut remonter à zéro pour que la neige tombe.
Une trêve après plusieurs jours où le mercure ne décollait pas des -20 degrés.
J'avais dormi comme un bienheureux. N'avais rien vu de la tempête.
Quel mot étrange pour un phénomène de silence et de coton. Presque immobile.
J'avais enfilé mon peignoir, lancé le café en passant, traversant la cuisine.
La lumière déjà, sa réverbération, m'annonçait ce qui ne pouvait plus être une surprise.
La porte ouverte, j'ai bien ri. Embrassant un ciel bleu sans nuages aussi haut que l'espace.
Le soleil faisait briller tout un manteau étincelant. Je dois plisser les yeux. Ebloui. Aveuglant.
A la fête comme on l'est aux situations extraordinaires. Ce que j'étais heureux.
M'imaginant me hisser sur ce grand toboggan, m'extirper de chez moi par la lucarne ouverte.
Sur cette belle neige compacte et craquante, toute neuve, éclatante, venue s'amonceler.
Que j'ai déblayée de mes propres mains virant à l'écarlate, comme un chien aurait fait
avec ses quatre pattes, pour trouver le plancher du palier de mon premier étage.
En face, de l'autre côté de la rue, le parc d'habitude si ordinaire ou quelconque,
s'était métamorphosé en une splendide terre vierge vallonnée de blancheur.
J'avais dû me lever tôt. La chaussée, les trottoirs, étaient tous invisibles.
Le ballet des chasse-neige de la ville de Montréal n'était pas arrivé dans ma rue.
Les plus gros dégageraient les voies automobiles. Les plus petits les sentiers piétonniers.
Et je rendais grâce à ce moment de folie où j'avais entrepris de m'installer ici.
Le café était bon. La journée serait belle. Je n'étais pas sérieux et n'avais pas trente ans.

Internet balbutiait. Et j'avais du courrier. Du postal. Enveloppes Air Mail.
Des nouvelles de France à la Belle Province. On s'étonnait toujours de ce choix improbable.
Moi qui aimais tant la plage, la chaleur, mes étés à la mer, la Méditerranée.
Cigales et canicule. Juillet et Barcelone. Tout ça, c'était acquis. Mon code génétique.
Etait-il difficile de comprendre que c'était précisément pour cela qu'il me fallait l'hiver ?
Qu'il fallait visiter les froidures extrêmes ? Expérimenter le Nord en plus de l'Amérique ?
Me confronter à mon diamétralement opposé ? A l'envers de mon monde. Au nouveau ?
Où j'ai découvert des miracles et bien des voluptés, entre autres choses inimaginables.
Sans parler des personnes connues, des êtres rencontrés, des amitiés solides.
Il me fallait sortir. Marcher sur Ste-Catherine. Rejoindre cette ville et crever l'édredon.
Faire craquer les pas sur ce tapis de neige, sur la Place des Arts et jusqu'à la rue Peel.
Ma cité déglinguée devenue féérique. Montréal bien plus belle que l'idée qu'on s'en fait.
J'ai un manteau de peau pour gravir le Plateau, remonter St-Denis jusqu'au Carré St-Louis.
Des Mexicains sourient. Et des Pakistanais. Marocains. Haïtiens. Autant de frères d'armes.
Dans leurs doudounes épaisses. S'étonnent comme moi. D'être heureux dans le froid.
Sur la chair découverte, la morsure de l'air, coupante comme la glace,
qui laisse une sensation de brûlure, chaleur inattendue, comme de propreté,
et un zeste d'ivresse, qui vous porte sur vos jambes dans un souffle de vapeur,
de cannelle et de thé, quand rouge canneberge, on se sent en santé.
Je retrouve l'odeur du bois désagrégé et rongé par la neige.
J'ai le goût des beignets, des bagels et du whisky-coca.
Un instant je m'arrête. J'y repense. Je m'y plonge. Le sentiment d'urgence.
J'ai aimé la voilure du pont Jacques Cartier. Et ce fleuve nourricier.
Qu'on appelle Saint-Laurent.


 

 

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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7 octobre 2012 7 07 /10 /octobre /2012 14:12

 

 

Elles sont en papier mâché. En je ne sais quoi.
Les feuilles du platane. Qui résistent. S'accrochent aux branches.
Me dissimulent encore en lambeaux poussiéreux quelques pans de façades.
Décolorées. Comme malades. L'éclaircie soudaine ne rend plus leur éclat.
Prêtes à se casser comme du biscuit. Au prochain coup de tramontane...
Le soleil n'est plus filtré par le carton qui demeure suspendu en attendant son heure.
Elles agonisent. Les feuilles mortes. Qui devront tôt ou tard débarrasser le plancher.
Le dimanche retient son souffle. La lumière un peu grise des nuages de cendres.
Sans atteindre mon humeur, m'éteindre ni me désarmer.
Je prépare l'été. Je prépare le printemps. Celui des succès et d'autres perspectives.
Il faut pouvoir marcher. Si on ne peut avancer sans tourner chaque page, une à une,
c'est dans l'ordre, je déblaie le terrain pour un nouveau feuillage.
L'air est doux, presque chaud, charmant pour la période.
Je prends goût aux rituels, aux manies, apprécie la méthode.
C'est une discipline que personne n'impose. Celle que j'ai choisie.
Quand je suis mon seul maître et mon propre tyran.
Le torse nu s'ébroue dans un studio de douceurs automnales.
Aux chaleurs de ta chair, le corps va se détendre.
J'ai quelques courses à faire et du linge à étendre.
En songeant que nos vies sont autant de mystères et ne sont pas banales.
Je ne pleure pas mon arbre, je sais qu'il ne meurt pas, fait semblant de le faire.
Qu'il va juste se tordre pour se figer enfin dans un sommeil profond,
le temps d'une saison, avant de reverdir à ces mêmes fenêtres.
Il me laisse le temps de tout organiser. Préparer l'émotion de fortes retrouvailles.
Je ne peux pas promettre lorsque nous y serons de ne pas fondre en larmes,
plus ému aux retours qu'aux allers, qu'aux départs et aux séparations.
J'aurai eu le loisir de reprendre les armes, d'avancer notre pion comme à ce jeu de l'oie,
et me présenterai, à lui comme à tant d'autres, avec le geste sûr et la parole claire.
L'hiver n'est qu'un instant, un couloir, le passage, qui nous donne le temps
de reprendre la main et sa respiration, pour réorienter la barque, se remettre sur les rails,
d'étudier les courants, les cartes et les vents.
L'été n'en finit pas de me brûler la peau. De me palper les cuisses et masser mon poitrail.
De malaxer mon sexe et mon ventre toujours vide. Lorsqu'il nourrit mon âme de plaisirs
différents, toujours renouvelés pour me garder vivant.
Il a ton ombre étrange sur les draps de mon lit. Ton sourire et ta voix aux abords de la nuit.
Quand il est un soleil qui compte chaque lune, chaque pas que je fais en souriant à la pluie.
L'année comme le jour a plusieurs éclairages. C'est un même segment. Une même unité.
Celle de notre vie qui s'éveille et se lève, avant de décliner pour aller se coucher.
Je regarde le platane dans la phase ascendante, sûr que le zénith n'est pas encore atteint,
je guette ta venue, veille sur le butin, de ce qui fut construit, créé à quatre mains.
Je marche torse-nu dans l'espace ténu. Celui dans ma poitrine se révèle bien plus vaste.
Quand je vois au-delà de l'instant, des matières, ce qui peut advenir et ce qui adviendra.
Je peux voir le vivant dans cet arbre robuste que l'on tiendrait pour mort.
Devine le circuit d'énergies et de sèves qui peuvent s'affaiblir comme des eaux dormantes,
qui défendent d'enterrer ce qu'on aime trop vite, quand l'amour immortel
donne des droits de suite.


       
       

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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6 octobre 2012 6 06 /10 /octobre /2012 13:39

 


Valérie Trierweiler n'est pas aimée du bon peuple ?
On se pose la question du statut de la 1ère dame de France,
des conflits d'intérêts entre responsables politiques et épouses journalistes,
qui sont des questions un peu dérisoires me semble-t-il dans la période que nous traversons.
Lorsque les deux questions soulevées n'ont pas à être constitutionnelles ni même juridiques.
Un candidat à la présidence de la République peut être célibataire ou homosexuel.
Il peut même être une femme. Et c'est la fonction du président qui doit être encadrée.
Pas celle de son neveu, de sa voisine ou de son chien, lorsque sa vie privée le regarde.
On se fout des personnes avec qui il dîne, petit-déjeune, passe des vacances.
Pour tout dire, on se fout des personnes avec qui il couche,
du moment que cela n'interfère en rien sur le bon fonctionnement de l'Etat.
Nicolas Sarkozy était allé seul rencontrer George Bush dans le Maine.
Pour ce qui est de l'étiquette, du protocole, de la représentation publique,
au-delà du Vatican et de quelques monarchies poussiéreuses, les démocraties modernes
devraient pouvoir s'arranger de tous les cas de figure sans faire d'histoires.
Qui en avait voulu à Cécilia à l'époque d'avoir décliné l'invitation de la famille Bush ?
En vacances dans le New Hampshire voisin, nous imaginions volontiers, non sans malice,
qu'elle ait pu donner une fausse excuse pour s'épargner un barbecue en mauvaise compagnie.
Qui ne s'est pas imaginé une gastro foudroyante pour éviter un dimanche interminable
avec des amis de façade ou la belle-famille à qui l'on n'a rien à dire ?
Cécilia Sarkozy, peu intéressée comme sa successrice par les rumbas diplomatiques,
pouvait bien avoir la migraine, lorsque les Français pour la plupart, ont apprécié le camouflet
à la famille américaine la plus détestée de tous les temps avec une certaine jubilation.
Ici comme ailleurs, on découvre l'aspect humain d'un chef de l'Etat, qui rencontre parfois
les mêmes problématiques personnelles que tout le monde, ce qui peut être rassurant.
Pour les tenants de la présidence normale, le destin fut généreux.
En effet, François Hollande rencontre les mêmes situations que bien des Français, tiraillés
entre plusieurs femmes et familles, avec autant de susceptibilités et d'orgueils à ménager,
pris dans l'exercice périlleux de faire accepter une nouvelle compagne à des enfants,
et autres acrobaties ardues que nous épargnait l'hypocrisie décriée des maîtresses cachées.
La double vie (pour ne parler que de celle-ci) de François Mitterrand avait en effet
été tenue secrète, ce qui était peut-être choquant pour les intégristes de la transparence,
mais nous avait au moins gardés de situations aussi embarrassantes que grotesques.
Tant que les responsables politiques ne commettent pas de délits ou de crimes,
d'un point de vue juridique seulement, la morale n'étant qu'un point de vue subjectif,
nous leur devons le droit à une vie privée, digne de ce nom, qui ne saurait venir polluer
les enjeux des mandats que nous leur avons confiés.
Dans le cas de Dominique Strauss-Kahn, qu'il aime les femmes n'est pas un problème.
Il peut aimer le sexe, les partouzes, le bondage, porter de la lingerie fine si il veut,
faire abstinence et se rabattre sur la nourriture ou le Bon Dieu, c'est son affaire.
Tant que nous sommes dans des pratiques entre adultes consentants, grand bien lui fasse !
Dans les dossiers ouverts à Lille ou à New York, personne ne peut lui faire le reproche
de son appétit sexuel ni de ses goûts en la matière, lorsqu'il a même le droit d'être infidèle,
et que la gestion d'un couple ne regarde que les deux intéressés.
Nous sommes ici dans des soupçons de viol, en réunion ou pas, et le viol est un crime.
On peut ne pas être d'accord à titre personnel, avoir telle ou telle opinion sur la question,
comme sur l'avortement ou sur la peine de mort, il se trouve qu'il fut décidé par la société
qu'un viol serait considéré comme un acte plus grave qu'un simple délit.
Ainsi, même s'il n'y avait pas mort d'homme, les accusations étaient assez lourdes
pour que l'on donne l'opportunité à chaque partie de s'expliquer sur les faits.
Et il est normal de chercher à connaître la vérité quand la communauté a besoin de justice,
à commencer par les victimes et leurs proches, et de demander des comptes aux inculpés.
En revanche, concernant DSK, j'ai été écoeuré par les spéculations sur sa vie de couple.
Impliquer Anne Sinclair était insupportable. Quoi que l'on pense d'elle et de sa communication.
Lorsque nous sortions allégrement du champ judiciaire et politique.
Cette journaliste et ce leader de premier plan avaient le droit de s'aimer inconditionnellement.
Comme ils avaient le droit d'être carriéristes, opportunistes, de se servir l'un de l'autre,
de n'avoir pas ou plus d'intimité sexuelle, et même de n'avoir jamais été vraiment amoureux,
et, bien que personnalité publique, brandir Anne Sinclair comme épouse bafouée qu'il fallait
béatifier absolument comme martyre au nom de toutes les femmes trompées de ce pays
ou simplement plaindre en lui trouvant un courage dont on n'a pas besoin dans pareille situation,
ou comme affreuse manipulatrice manoeuvrant froidement son pur-sang de mari pour accomplir
une ambition à la fois personnelle et communautaire, était dans les deux cas déplacé.
La victime présumée dans cette histoire ne s'appelait pas Anne Sinclair mais Nafissatou Diallo.
Et personne n'a à juger les comportements que l'on peut diversement apprécier comme
de l'abnégation ou du courage pour les uns, du pragmatisme et de l'arrivisme pour les autres,
des épouses de responsables politiques, se nommeraient-elles Anne Sinclair ou Hillary Clinton.
J'en profite pour dire que je ne vois pas en quoi, en cas de femmes sincèrement amoureuses
et fidèles à leurs maris, le fait qu'elles subissent de telles humiliations publiques puisse faire
d'elles des Saintes ou des modèles admirables, lorsque, si nous pouvons compatir à leur douleur,
j'aurais personnellement davantage applaudi à leur émancipation qu'à leur sacrifice.
Ceci étant dit, il me paraît évident que de tels développements dans la presse, sur des affaires
qui participent à la peoplisation de la politique, sont de bonnes occasions de faire diversion.
Je ne suis pas de ceux qui diront que le phénomène est nouveau quand il ne l'est pas.
Mais de ceux qui se désolent qu'on lui accorde une telle importance dans les médias.
Lorsque bien sûr, comme les faits divers, les histoires de cul de nos élus,
comme celles des têtes couronnées dans un même type de presse, réveillent en chacun de nous
toutes les passions les plus primaires et les plus constitutives, par le biais de l'identification.
Bien sûr, Madame Michu, si vous aviez été à la place de Carla, vous auriez fait comme ceci.
Quant à vous, à celle de Rachida Dati, vous auriez sans doute fait cela, je comprends bien,
parce que vous êtes comme ça et pas autrement, à ceci près que vous n'y êtes pas.
Au-delà des conversations de salons de coiffure, il y a des débats sur les plateaux de télévision.
Je ne parle pas d'NRJ12 et de W9 qui se font au contraire une spécialité de savoir si Linda
a embrassé Geoffray dans la dernière télé-réalité de la chaîne, mais d'émissions politiques,
à grand renfort de journalistes et d'éditorialistes qui s'honorent de vouloir éclairer l'opinion.
En quoi la popularité de Valérie Trierweiler est un problème pour François Hollande ?
Quand Valérie Trierweiler, si elle est quelque chose pour le Président de la République,
n'est absolument rien pour le pouvoir d'achat, les retraites, et l'Education Nationale.
Elle devient un problème quand la presse et les médias en font un.

On pourrait penser comme d'autres sur la polémique bien commode du twitt :
" Si François Hollande ne sait pas tenir sa compagne, comment tiendrait-il
son gouvernement et l'Etat ? ", voyant ici une belle occasion de mettre en doute son autorité.
(Puisque cela va souvent plus loin, en remettant carrément en question jusqu'à sa virilité.)
On pourrait aussi penser comme moi, que, si le seul problème de François Hollande
était le comportement de sa compagne, ce serait bon signe, et formidable pour notre pays.
On comprend ce qui se passe dans l'opinion : Valérie, c'est la méchante belle-mère.
Pour beaucoup de Français, la gentille, c'est la maman des enfants. C'est Ségolène.
Lorsque, infantilisés, nous avons des égards pour l'ex épouse. L'image de la mère.
Une affection pour cette femme que nous avons aimé détester quand elle était candidate.
Bien sûr que Valérie n'est pas populaire. Valérie, c'est la pute. La nouvelle qui ne doute de rien.
Et, encore une fois, nous projetons nos propres histoires sur celle des personnalités publiques. 
Ségolène fait partie du décor depuis des années, a pris des risques, passé chaque étape,
et le baptême du feu, elle a fait les choses dans l'ordre, mérité notre considération.
Quelle est cette petite intrigante, parvenue, qui veut doubler tout le monde par la droite ?
Madame Michu ne supporte pas d'entendre ce nigaud de François clamer dans Gala
que Valérie est la femme de sa vie. Quid de la mère de ses enfants ?... Insoutenable.
Moi-même, j'ai une part de madame Michu en moi, lorsque je confesse devant vous
que j'ai une tendresse pour Ségolène Royal que je n'ai pas encore pour la première dame.
Mais enfin, l'émotion passée, ne pouvons-nous pas remettre les choses à leur place ?
Outre le machisme qu'il faut, pour imaginer que Ségolène comme Anne (ou Hillary)
sont de pauvres petites femmes fragiles qu'il nous faut protéger de la goujaterie masculine.
Il faut savoir qu'elles ont le cuir aussi épais que ces messieurs quand elles s'exposent,
précisément, de leur plein gré, à la critique, au jugement, aux insultes parfois,
entre autres réjouissances impensables qui sont le prix à payer pour une notoriété.
Il n'y a pas de problème Trierweiler pour la France.
Et l'on se moque bien de ses problèmes de positionnement et de carrière.
Si elle veut être journaliste, qu'elle le soit, elle en a le droit. Qu'elle prenne ses responsabilités.
Si elle veut vivre à l'Elysée et jouer les Jacky Kennedy sur les tarmacs du monde entier,
qu'elle le fasse, elle en a le droit - et l'opportunité - mais qu'elle choisisse !
Voilà une petite fille ravissante à qui le destin a souri. Et la voici qui panique.
Un mandat, c'est cinq ans. Deux mandats, une décade. Elle peut tout faire !
On voit bien que Carla peut désormais reprendre sa guitare et murmurer ses ballades,
Comme si de rien n'était, puisqu'il y a plusieurs vies dans une vie.
Comme elles sont mignonnes nos Béatrice Schönberg, nos Audrey Pulvar,
nos Christine Ockrent qui se posent tant de problèmes existentiels, de cas de conscience,
et n'assument pas toujours le fait de vouloir à la fois le beurre et l'argent du beurre.
Qui veulent à la fois briller par elles-mêmes, être autonomes, et se faire valoir aussi
par les fonctions de leurs ministres de maris ou compagnons, les ors de la République,
sans qu'il n'y ait forcément - pas de procès d'intention - l'idée du conflit d'intérêt.
J'imagine que partager la vie d'un ministre n'est pas chose facile.
On pourrait demander à messieurs Simone Veil, Edith Cresson, Margaret Thatcher,
Condoleezza Rice ou Angela Merkel. On pourrait le demander aussi bien,
à toutes les femmes de ministres que l'on ne connaît pas. Et doivent avoir leurs problèmes.
Après tout, dans tous les couples, je suppose, il y a des accords et des équilibres à trouver.
Sur les rôles de l'un et de l'autre. Les compromis. Le partage des tâches. Who cares ?
Combien de femmes doivent prendre des décisions aussi cornéliennes, partout,
tout le temps, lorsqu'elles travaillent et qu'elles veulent aussi être mères ?
Est-ce que je préfère la maternité à ma carrière ? Est-ce que je dois m'arrêter ?
Peuvent-elles compter - quand elles en ont un - sur leur compagnon ou leur entourage ?
Alors bien sûr, non, pardon, je ne vais pas m'apitoyer sur le sort de Valérie Trierweiler.
Qui, en fait d'embarras, n'a que celui du choix. Mais, continuez à la détester, et, peut-être,
finirais-je par l'aimer en réaction, à avoir une sympathie pour elle dont elle n'a que faire.
Le couple présidentiel n'est pas un ticket. Auprès du président, constitutionnellement,
la place est prise, par un premier ministre. Monsieur Jean-Marc Ayrault en l'occurrence.
C'est le seul couple qui vaille pour la bonne marche des politiques de notre pays.
Et ce qui donne le droit à Bertrand Delanoë par exemple d'aspirer à l'Elysée.
Que les "femmes de", au même titre que les "maris de", restent à leur place,
ou changent de place, mais ne viennent pas saboter l'entreprise en envahissant l'espace public
parce qu'elles veulent exister ou être aimées à tout prix, et tout se passera merveilleusement.
Quant à l'inconscient collectif, élites comprises il faut croire,
je sais que nous avons en France la nostalgie de la monarchie, mais il serait temps,
bons enfants que nous sommes, que nous grandissions un peu, et que nous puissions
embrasser la démocratie à pleine bouche, sans avoir pour cela besoin de tenir encore et encore
la main de papa et maman.

   

     

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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4 octobre 2012 4 04 /10 /octobre /2012 13:08

 

 

Mes avant-bras poilus cuisent sur la table du café.
La tête est à l'ombre d'un parasol. Il y a du monde en terrasse.
Non pas dans les lieux du centre-ville que je fréquente habituellement.
Mais à proximité du campus où je vais bientôt traîner ma carne quadragénaire.
La ville nouvelle du Moulin à Vent. La Rambla du Vallespir et ses palmiers.
Dans toute la cité, c'est le même décor. Des tours blanches et des palmiers.
Des perspectives. Des symétries. Des esplanades. Bucarest en Afrique du Nord.
Les Pieds-Noirs regroupés dans un complexe soviétique bien que méditerranéen.
Les arcades se font face de part et d'autre des rangs d'arbres parfaitement alignés.
Les Années 60. Dont il reste quelques veuves et leurs filles célibataires.
Je sors de ma chemise noire les plannings contradictoires de deux institutions différentes.
Je vais devoir faire des choix ou des sacrifices. Fataliste. Un stylo rouge en main.
Un bruit affreux me fait lever le nez.
Ce n'était pas un moteur de bagnole. Ni le percolateur du bar.
Mais celui, désagréable, d'un évier qui se vide péniblement dans d'atroces borborygmes.
Et ça reprend, ça glougloute sec dans le siphon en arrachant les canalisations.
Et je regarde autour de moi pour m'assurer que nous ne risquons rien de tragique.
Il était assis sur son cul. Juste à côté de moi. Au pied de sa maîtresse à la table voisine.
Un bulldog anglais qui bavait tout son inconfort et trouvait le temps long.
Bien sûr. Ce gargouillement intempestif était animal. Pratiquement porcin.
Le physique du chien me met en tête autant de cochons que de truies.
La patronne semble habituée. Ne fait pas attention à ses manifestations monstrueuses.
A ces longs grognements hésitants entre ronflements et flatulences.
Je la regarde. Et voilà que j'oublie mes plannings.

A la fac, je l'avais relevé la veille,
il y a ceux qui s'en foutent et ceux qui ne s'en foutent pas.
Et les premiers semblent toujours plus nombreux que les seconds.
Voilà une chose qui n'avait pas changé.
J'étais assis sur ma chaise d'écolier, dans une salle du bâtiment M,
bien conscient que je faisais partie des trois groupes.
Celui des gens qui s'en foutent, celui des gens qui ne s'en foutent pas
et celui de ceux qui observent les deux autres.
Ce dernier est celui de ceux qui savent être à la fois acteurs et spectateurs.
Je prenais des notes. Les propriétés sémantico-référentielles. Bien sûr.
D'un pronom démonstratif. Qui peut être déictique, anaphorique ou générique.
Bien des notions qui font de la grammaire une science respectable.
Je fais partie des quelques étudiants impliqués qui se passionnent pour cet art.
Je fais partie de la majorité qui fait simplement acte de présence.
Je fais partie de moi, assis là, le nez dans une copie double griffonnée nerveusement,
partagé entre plusieurs mondes et plusieurs niveaux d'appréciation du réel.
Je me vois écrire sans savoir qui je suis.
Suis-je le garçon de 22 ou 23 ans qui fréquentait les mêmes bâtiments
et les mêmes couloirs il y a quelques années ?
Qui rentrait à Bompas au volant de son AX blanche le soir, dîner avec ses parents ?
Suis-je l'homme qui vit depuis deux ans au pied de la cathédrale après bien des méandres ?
Qui a vécu au Canada, à Barcelone ou Paris, et revient des nuits blanches à New York
et des soirs de première, avec la blasitude de ce qui m'excitait ?
Le boomerang a survolé l'Atlantique et mille autres déserts avant de se planter.
Ici-même. Là où je suis assis. Devant un professeur crédible.
Bien que plus jeune que moi.

Elle est grosse. Enfin... Sa tête est grosse. Son ventre est gros.
Ses cuisses sont grosses. Quand les épaules sont étroites.
Elle porte un tee-shirt et un bermuda.
Je dois regarder à nouveau. Regarder mieux. Quelque chose m'échappe.
Elle me fait penser à quelqu'un. A un homme d'abord.
Pas maquillée du tout. Cheveux courts. Un grand nez.
Je pense à quelqu'un de la famille. Vieille fille. Et son côté religieuse.
Voilà. C'est ça. Pas lesbienne. Religieuse. Qui a renoncé au sexe.
On peut avoir renoncé aux hommes sans être homosexuelle.
Mais non. Ce n'est pas à ma tante que je pense. Qui est plus féminine.
Je regarde mieux. En fait, les cuisses ne sont pas si grosses. Le ventre n'est pas si gros.
C'est sa tête. Disproportionnée. Qui donne une drôle d'impression.
Le chien et ses nuisances sonores ne m'aident pas à adoucir l'image de la maîtresse.
Elle se sert du vin au pichet comme un mec. Elle mange un steak frites.
Au bord de la route. A quatre heures de l'après-midi.
Elle s'adresse à la serveuse. Et tout s'éclaire. Voilà à qui elle me fait penser.
A Gisèle Rouleau. La plus ronde et la plus acariâtre des Vamps.
La moins commode. Sans la nappe cirée qui lui sert de blouse ou de robe.
Gisèle Rouleau en camping à Palavas. La Rambla se change en front de mer.
Le chien à son image. Aussi grincheux, expansif et repoussant.
Le sucre fond dans mon café. Et je suis fasciné.

Il y a un plan. A suivre. Etape par étape.
Pour se frayer un chemin dans la jungle. Tenter d'exister.
Trouver le compromis entre la nécessité et le désirable.
Placer une brique sur l'autre. Monter les murs. Avec méthode.
Mes avant-bras cuisent au soleil et je déroule le film jusqu'au bout.
Ces gosses font acte de présence avant tout pour obtenir un diplôme.
Savent-ils à vingt ans ce qu'ils veulent faire de leur vie ?
" Vous me vendez une cigarette ?... "
Gisèle m'offre son plus beau sourire.
Je fourre mes plannings dans ma chemise noire.
" Pardon, dis-je. Je vous ai donné envie de fumer... "
Je ne prends pas l'argent. Je prends le sourire et la proposition.
Sais-je à quarante ce que je veux faire de la mienne ?...
Je salue ma voisine de table que je finis par trouver sympathique.
Un quart d'heure de plus, et je m'attachais à son chien dégoulinant de bave.
Les occurrences. Les syntagmes. Les tiroirs d'une langue. Sur le trottoir d'en face.
Je me lève. Quitte la terrasse. Je traverse. Le bus arrive. Et paf le chien.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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3 octobre 2012 3 03 /10 /octobre /2012 00:24

 

 

Des oriflammes qui claquent au vent.
Je rugis ma détermination.
Du poil blanc dans la crinière.
La bête n'est pas morte.
Des griffes dans les coussins.


 

 

 

Philippe LATGER
Octobre 2012 à Perpignan

 

 

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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 22:14

 

 

Suivre Oguri. Sa silhouette longiligne. Le grain de beauté au coin de sa bouche.
Les camphriers. Les bambous. Les néfliers. Les magnolias. La floraison des cerisiers.
Je ne comprends pas un traître mot. Aux inclinaisons répétées, respectueuses, déférentes.
Je me plie aux coutumes et aux usages que l'on m'enseigne.
Oguri va me conduire loin de Tokyo. Dans les monts Kii.
La distance entre nous. Attise l'attirance.
Le contact physique est rare. Accidentel.
Sur l'accoudoir des fauteuils. Shinkansen. Aérodynamique.
Une décharge électrique qui ne laissera rien paraître.
Le thé. Le tofu. Les soupes. Le poisson cru. Extraterrestre.
Je veux tout savoir de son pays. De cet empire. Tout voir et tout savoir.
Honshu se déroule sous mes yeux de tout son long. Et je vais en confiance.
Bardés de technologies et d'écrans, nous revenons aux ancêtres et aux dieux.
  
Oguri et ses cheveux aux reflets de cuivre. S'occupe de moi.
" Are you ok?... "
Le timbre soudain, est celui d'une voix humaine très intime.
Les barrières culturelles commencent à s'effriter.
J'étais dans les nuages. Puis dans une percée.
" Yes I am... What about you? " Mes yeux se plantent dans les siens.
Qui se détournent embarrassés. Il faut plaisanter. Rire de quelque chose.
Nagoya dans les fenêtres. Le grain de beauté au coin de sa bouche.

Coup sur coup, bien sûr, tu avais perdu ta mère d'abord, puis ton père.
Comment aurais-tu pu faire autrement ? Une dépression était la moindre des choses.
Pouvais-je faire quelque chose ? Quand j'étais sorti de ta vie depuis quelques années déjà.
J'ai envoyé un texto. Et puis un autre. Tendu des perches. Que tu n'as pas saisies.
Je n'ai pas insisté. J'incarnais sans doute quelque chose qui ne pouvait pas t'aider.
Manifestement, tu n'avais pas besoin de ça. Tu n'avais pas besoin de moi.
Nous deux, c'était déjà une autre vie. Une vie où tu avais tes deux parents.
Quand tu m'as rencontré, j'avais déjà perdu ma mère.
Il y eut un moment où j'ai senti que tu étais prêt. A parler. Me parler.
De ces foutus cancers qui tiennent à faire de nous des orphelins.
En effet, j'avais connu ça. J'étais passé par là. Avant toi.
Mais cela suffisait-il à rapprocher deux êtres ?
Je ne pouvais pas comprendre tout à fait ce que tu étais en train de vivre.
Et j'ai cette façon brutale d'asséner des réalités froides, qui passent souvent mal,
même avec ce cynisme pathétique ou maladroit, qui avait bien de la peine
à se faire accepter comme sens de l'humour.
Mais au fond. Je veux bien assumer mon indélicatesse.
Quand la vie est plus grossière que moi quand il s'agit de rappeler ses principes.
Nous allons tous mourir. Et il est dans l'ordre des choses, et sans doute souhaitable,
que nos parents s'éteignent avant nous.
Il est terrible en effet de perdre ici une part d'insouciance et de sa propre enfance.
Un tel évènement sonne la fin de la récréation. Il est l'heure d'être adulte.
Cette fois, on ne plaisante plus. Les prochains sur la liste. Chrono en main.
Il y a un réveil en sursaut. Perdre nos parents. C'est une double peine.
Sans filet. Nous y voilà. Nous perdons nos parents et nous sommes mortels.

J'en suis le premier surpris.
Assis face à Zemmour et Naulleau, il est un roc et un château de cartes.
Son regard brille dans un sourire auquel je trouve une tristesse émouvante.
J'en suis le premier surpris. Je trouve du charme à Alain Minc.
Il y a quelque chose d'enfantin. Jusque dans son érudition.
Dans son désir d'exister, de séduire, de convaincre.
Il y a un gosse qui m'apparaît. Que je fantasme. Que je devine.
Le petit Parisien, fils de juif polonais, énarque, conseiller politique,
défend son dernier ouvrage sous une montagne d'étiquettes et de préjugés.
Lorsque son regard attachant contraste avec des répliques cinglantes.
Voilà un homme qui s'est inscrit dans ces élites que l'on aime détester.
Et que je ne peux accabler lorsqu'il fait la promotion du fédéralisme pour l'Europe.
Cela me rassure un peu. Si Minc sort du bois sur cette question, c'est qu'elle avance. 
Jean-Vincent Placé fait de même de son côté. Il prépare l'opinion à cette nécessité.
Les fameuses élites, dont les journalistes se désolidarisent avec beaucoup de vigueur
pour écarter les doutes sur de possibles connivences, ont décidé de passer la seconde.
Et il est temps, manifestement, d'expliquer qu'il n'y a que deux façons de sortir
de la crise financière sur le vieux continent : faire faillite les uns après les autres,
ou arrêter de faire semblant de construire l'Europe et nous fédérer une fois pour toutes.
Je regarde Alain Minc avec de la sympathie pour son anglophilie.
Partageant ses réserves sur Napoléon et sa préférence pour Charles Quint.
Et me désole que l'on puisse encore passer pour un traître à la nation si l'on ne voue pas
absolument un culte inconditionnel aux figures de Bonaparte et du Général de Gaulle.
Je ne promets pas de lire son livre. Prends plaisir à écouter l'échange avec Zemmour.
Quand les deux polémistes ont en commun des fragilités qu'ils peinent à travestir.
Qui pourraient par moments révéler un même manque de confiance en soi.
Des marques de trac, d'échauffements, d'emportements et de vulnérabilité.
Qui, malgré leurs efforts pour les canaliser, être crédibles et convaincants,
les rendent agréablement humains et dignes d'intérêt.

La forêt est dense. Les arbres millénaires. Les sentiers empierrés.
L'humidité libère des odeurs mélangées de bois et de cheveux asiatiques.
Celles de la peau d'Oguri qui me parvient dans une inspiration profonde.
J'essaie de donner le change aux informations sur les routes du pèlerinage.
Sur les différences entre bouddhisme et shintoïsme. Entre autres choses.
Lorsque le magnétisme s'accroît avec la proximité.
Le site participe à mon agitation. Désorienté par tant de dépaysement.
Dérouté par tant de beauté et de raffinement. De voluptés. Et d'érotisme.
Nous arrêtons nos pas face au sublime tintamarre de la cascade de Nachi.
L'eau accrochée au relief en nuages suspendus, se mêle aux crachins divers,
et aux brumisateurs qui gorgent tout d'une moiteur épaisse terriblement sexuelle.
Dans la végétation luxuriante, une traînée blanche bruisse sur toute sa hauteur.
Il me faut soudain veiller à dissimuler au mieux une érection inattendue.
Le gingembre peut-être. Ou la viande de thon. Ou encore le habu-sake.
Avec le cadavre d'un serpent entier emprisonné dans la bouteille.
Dont le venin, diffusé dans l'alcool, aurait paraît-il des vertus aphrodisiaques.
Oguri testait discrètement mon seuil de tolérance. Quand j'étais en confiance.
Me sentais de mieux en mieux. A son contact. Au son de sa voix.
Au grain de beauté au coin de sa bouche.
J'en étais arrivé à appréhender ce qui allait suivre.
Un bain dans les sources d'eau chaude. Dangereux.

Je te regarde à la télévision. Et je me dis : " tôt ou tard mon bébé, nous mourrons. "
C'est vrai, cela peut tordre le ventre et le cerveau, nous pulvériser le crâne,
nous envoyer en psychiatrie, à double tours, ou au cachot.
Alors vient une série de questions que l'on attribue à des gosses de dix ans.
Et que nous avons le droit de nous poser, en tant que gosses de dix ans que nous sommes.
" Où est-ce qu'on va quand on meurt ? " " Pourquoi je suis moi ? " " Qu'est-ce qu'on fait ici ? "
Les deux personnes censées répondre à ces questions ne sont plus là.
C'est à devenir dingue. Est-ce que Dieu pourrait faire l'affaire ? Servir à quelque chose ?
Pour habiter ce silence assourdissant. Pour combler ce vide creusé dans nos entrailles.
Il faut apprendre à se passer de la soluce. A avancer sans savoir où nous allons.
Avec l'assurance que nous nous construisons nous-mêmes sur un monde volatile.
Un jour, ma mère était là. Le lendemain, à la même heure... disparue. Eteinte.
Cela nous arrivera. C'est la seule certitude. Un jour nous serons là. Le lendemain... Pfuit !
Ce qu'il faut de raisonnements cartésiens pour se bâtir une confiance et quelques vérités.
Prendre le parti de faire confiance. Avoir confiance. En la vie. En Dieu peut-être. En la mort.
Tout se passera bien, ça ne fait pas mal. Tout cela n'a pas servi à rien.
Pourquoi aurions-nous ce besoin de suivi, de mises en perspectives, de droits de suite,
si l'univers devait finalement nous décevoir en n'ayant rien prévu dans ce sens ?
Il serait pervers, ce monde, tordu, malsain, criminel, de nous avoir dotés d'espoirs,
si tous devaient finalement être déçus. Quel grand malade il serait !
A quelles fins sommes-nous conscients de ce qui nous arrive ?
Moi-même, mon bébé, dans ma grande sagesse, aurais-je pu t'aider ?
Quand je ne suis pas certain de la réalité de ce que nous vivons tous.
Quand il m'arrive de douter que tout cela existe vraiment. A commencer par nous.
Je pense parfois à cette imagination débordante que j'ai eue d'avoir tout inventé tout seul.
Toi, à qui j'écris. Les mots avec lesquels je le fais. L'ordinateur sous mes doigts.
Et les gens qui me lisent. Tout ça, c'est dans ma tête. Dans la tête de Dieu.
Qui a la suffisance de penser qu'il est Lui, en personne, et qu'Il a tout créé.
Je ne sais pas si tu existes. Si tes parents ont existé. Si j'existe moi-même.
Je n'ai pas de réponses sur les raisons de ce rêve éveillé que je fais.

Alain Minc peut se convaincre d'exister aux témoignages du plus grand nombre.
Comme Zemmour et Naulleau, comme Lady Gaga, comme toi  et bien d'autres,
qui s'exhibent devant des caméras de télévision pour crier qu'ils existent.
La somme des téléspectateurs, des regards, des consciences... cela doit donner de l'épaisseur.
A notre matière. Une image fine comme l'écran plat dans le salon de nos contemporains.
Dans tout le pays. Dans le monde entier. Laisser une trace de son passage sur terre.
Cette volonté farouche d'être. D'être là. De servir à quelque chose.
La politique. Améliorer la condition. Préciser les contours. Les motifs.
L'action. La parole. S'enivrer de bruits et de mouvements. S'accrocher aux branches.
Si le monde n'existe pas, construisons-le. S'il n'a pas de sens, nous lui en trouverons,
finirons par lui en donner un, à force de convictions et de parti pris.
Aussi vrai que Napoléon et Bismarck ont existé et expliquent l'Europe d'aujourd'hui.
Ma mère a existé et explique que je suis là pour l'écrire et pour en faire état.
Que Dieu prenne des vacances. C'est à nous de donner du sens à tout cela.
C'est à moi de faire de ma vie quelque chose. De lui donner des raisons d'être.
Alain Minc a du charme. De celui qui se défend d'en avoir.
Une incarnation du dépassement de soi-même. Du surpassement.
Avec cette malédiction de vouloir briller ou influer sur le monde.
Nous allons fédérer les Etats de l'Union Européenne.
Fédérer tous les Etats de la planète dans une démocratie universelle.
Eliminer les grandes épidémies, la misère et la faim dans le monde.
Que pourrons-nous faire de plus dans un monde fini ? Disparaître ?...
Le jour où nous aurons réussi. Où il n'y aura plus de conflits ni de guerres.
Les peuples heureux n'ont pas d'Histoire. Est-on encore vivant ? Sans Histoire ?
A la fin de cette dernière, lorsque tout sera réglé. Il n'y aura plus d'humanité.

Un onsen. En hauteur. Surplombant une vallée couverte d'arbres et de nuages.
L'eau à quarante degrés. Mon corps s'est amolli. Nu dans une vasque verdâtre.
La vapeur pour ouvrir tous les pores de son visage qui se rapproche du mien.
Au fil du temps, en fin de compte, la distance s'est réduite. Et se réduit encore.
Oguri. Le grain de beauté au coin de ma bouche.
J'ai fermé les yeux. Au baiser du Japon tout entier qui désire mon sexe.
Le thé et le shamisen. La forêt suspendue quelque part entre le ciel et l'océan.
Quelle impression étrange. Le désir de l'étrange. D'épouser l'étranger.
De lâcher prise et de s'abandonner. En confiance. A d'autres réalités.
Les différences anéanties au dénominateur commun de la chair.
A la sauce de soja. Au tofu. Au gingembre. Les yeux fermés. Désincarné.
Les plaisirs d'une sophistication extrême. Quand c'est toi qui m'embrasses.
A l'abri des regards. Là où le monde est monde. Premier et éternel.
" Are you ok? " La réponse dépend de la tienne. Mon amour.
" What about you ? "...

 

 

 

Philippe LATGER
Septembre 2012 à Perpignan

 

 

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29 septembre 2012 6 29 /09 /septembre /2012 13:56

 

 

Produire de l'armement. Vendre des armes.
Quelle belle industrie pour les démocraties.
Pour promouvoir les Droits de l'Homme.
Un conflit pour libérer un pays du tyran que l'on avait soutenu pour ne pas dire financé.
Et autant d'armes laissées sur le terrain comme culots de cartouches. En libre-service.
Il n'y a qu'à se baisser pour les ramasser et disparaître avec dans le désert.
Commissions. Rétrocommissions. Des valises de cash. Les pâturages suisses.
" Je me posais une question... innocemment.
- Vas-y Philippe. On t'écoute. Lance-toi.
- Si, suite à une hallucination collective, l'ONU et tous les gouvernements du monde,
se mettaient d'accord pour interdire les paradis fiscaux... imaginons...
je me demandais... la Suisse ne présenterait-elle pas sa candidature pour entrer dans l'Union ?
- L'Union Européenne ?
- Oui, celle-ci. Précisément. Bien sûr, cela relève de la science-fiction.
Je ne vois pas, hélas, comment les paradis fiscaux pourraient être éradiqués.
Il faudrait pour cela bien des révolutions simultanées et coordonnées.
Arriver, non sans casse, à une gouvernance mondiale démocratique,
que je n'imagine pas possible avant quelques siècles encore, si nous n'avons pas disparu.
Qu'une règlementation unique puisse s'appliquer à la planète entière. L'harmonisation.
- En effet, c'est même au-delà de la science-fiction.
- Ce que je veux dire, c'est que je soupçonne la Suisse de bouder l'Union Européenne
forte de son statut de banque parallèle, qui ne lui donne en effet aucun intérêt d'y entrer.
Et que, le principe de neutralité est bien commode.
Je ne fais pas de procès d'intention à la population, au peuple suisse, s'il existe,
dont je ne connais même pas l'opinion sur le sujet.
Regarde la carte de l'Union. Ce trou, là, au milieu... ça ne te gêne pas ?
- Qu'est-ce qui te gêne au juste ?
- Ben, l'idée de payer des impôts quand d'autres les contournent...
Tu trouves que c'est juste ? Tu trouves ça normal ? C'est la fête, allons-y.
La masse bosse, se fait chier, fait ses heures pour mériter son salaire, contribue à la société,
peine à boucler ses fins de mois, pendant que des rigolos qui se croient intelligents
lorsqu'ils ne sont jamais que malhonnêtes et sans scrupules, esquivent les règles du jeu. "
Cette bonne masse au dos courbé, qui ne regarde pas plus loin que le bout de ses chaussures.
Qui renonce à la violence tant qu'elle peut vivre décemment, parvenir encore à s'alimenter.
Nous savons cela. L'argent sale. La drogue. La prostitution. Les butins de guerre.
Nous l'avons toujours su. Cela fait partie du paysage. Cela fait partie du monde.
Et nous avons fini par oublier de trouver cela insupportable ou simplement aberrant.
" Pourquoi cela changerait-il ? Qui ne dit mot consent !...
Pourquoi les industriels, les mafieux, les dictateurs, se priveraient des privilèges
que personne finalement ne remet en question si ce n'est à la fin de repas alcoolisés ? "
Malins ou pas, ils ne le seraient pas de se soumettre aux services fiscaux de leur pays.
D'autant que l'on imagine bien les passerelles et les accords ou les contrats discrets
entre eux et les partis politiques, et donc, entre eux et les gouvernements.
Oui, voilà. C'est comme le nucléaire. Voyez-vous. Le complexe militaro-industriel.
Vous voyez bien que ce sont des emplois et des recettes dont on ne peut faire l'économie.
" Alors, tu proposes quoi ? La révolution totale ? De tous les peuples ? La lutte finale ?
- Je propose d'annexer la Suisse et de la mettre au pas... Quoi d'autre ? Et sois sans craintes.
Nous n'allons pas pendre tous les banquiers et les fraudeurs sans procès équitables.
- Dans les tribunaux d'un Comité de Salut Public ? "
Certes. Je n'ai rien de raisonnable à proposer.
Rien de sage et de mesuré pour enrayer la corruption généralisée.
" Je m'étonnais juste que nous nous en accommodions. "

 

 

 

Philippe LATGER
Septembre 2012 à Perpignan

 

 

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27 septembre 2012 4 27 /09 /septembre /2012 15:16

 

 

Ask the Dust est ouvert sur ma cuisse. Posé comme un accent circonflexe.
Jambes croisées dans mon fauteuil. J'ai retourné le livre le temps de fermer les yeux.
Le visage tendu vers le ciel. Bleu. Bleu comme en juillet. Au soleil qui me brûle.
Les avant-bras, découverts, alignés le long des accoudoirs rôtissent avec eux.
Mon front et mes joues commencent à piquer. Mes paupières fondent. Je ronronne.
John Fante attendra. Et mon café aussi. J'entends l'activité tranquille d'une pause déjeuner.
Et, raide dans mon fauteuil, je n'en suis pas moins offert et finalement absent.
L'été, comme moi, peine à quitter cette ville. Reporte sans cesse son départ.
Quand nous avons l'un et l'autre d'excellentes raisons de rester.

 

 

 

Philippe LATGER
Septembre 2012 à Perpignan

 

 

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Lectures

 

 

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Lambert Wilson  Lambert Wilson 

 

  Contes du Jour et de la nuit

      Véronique Sauger     

 

Lettres à ma ville

  (spectacle des Estivales juillet 2000) 

 

 

  publication chez Soc&Foc 2012 

La terre est rouge

 

interview la terre est rouge

 

 

 

 

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