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5 novembre 2011 6 05 /11 /novembre /2011 00:19

 

 

Je me fais un café. Je pense à toi. Le sucre. Le mug. La cuillère.
J'arpente l'appartement d'un pas décidé, comme si j'avais quelque chose d'important à faire.
Je regarde par la fenêtre et il pleut. Je pense à toi. Les parapluies qui se pressent sur le parvis.
Les reflets au sol. Des feux arrières de voitures. Des silhouettes dans les manteaux d'hiver.
Je dois écrire. Je pense à toi. Une commande. Un exercice. Une copie à rendre. Au plus vite.
Le retour de novembre. Dans la chambre. Le ciel bas. Le chauffage. Pull-over. Je pense à toi.
Je dois marcher. Même sous la pluie. Il faut que je marche. Aller quelque part. A tout prix.
Sortir d'ici. Je pense à toi. Au Castillet. Au Palmarium. Aux lieux que je connais. Par coeur.
Et qui m'écoeurent. Que je ne supporte plus. Je dois m'asseoir. Et respirer. Je dois fumer.
Je pense à toi. A chaque regard qu'on me donne. A chaque sourire que je rends.
Les arbres penauds. Les palmes en berne. Saison de mort. Et de grisaille. Et de noirceur.
Je dois marcher. Le mouvement. Je pense à toi. Sur les allées. Ou sur les quais. A nos platanes.
Je reviens sur les Remparts. La Place Molière. Et Bir Hakeim. Le Park Hotel. Tout rétrécit.
Tout écrasé par un orage. L'obscurité. Je cherche une porte. Une sortie. Ou un passage.
Une bouffée. Mais d'oxygène. Je tourne en rond. Je me maudis. Je pense à toi.
Les vêtements. L'humidité. Je ne supporte rien. Je suis fatigué. Je marche. Je marche.
Une porte est ouverte. Enfin... j'entre.

" Mon Dieu... je ne sais pas si vous existez. Mais j'ai besoin de parler à quelqu'un... "
J'avance dans la nef d'un pas décidé, comme si j'avais quelque chose d'important à faire.
Je ne prête pas attention aux chapelles latérales,
aux candélabres, aux constellations de veilleuses. J'avance vers le choeur.
Comme si j'étais chez moi. Comme dans l'open space d'un bureau.
Où j'aurais mes habitudes. Right to the point. " Seigneur, il faut qu'on parle. "
Il y a quelque chose qui saigne. Quelque chose qui brûle. Je ne sais pas ce que c'est.
C'est mon sang. Je sais que je ne vais pas mourir. Mais une angoisse ne desserre pas son étau.
Me voilà assis sur un banc. Pas au premier rang, non. Tout de même. Au sixième. De côté.
Prêt à partir. Je dévisage le retable. Je cherche Dieu. " Seigneur, tu écoutes ?... "
Quelque chose ne tourne pas rond. A commencer par moi. Qu'est-ce que je fiche là ?
Je perds mon temps. Comme devant la tombe de maman. Un oeil sur l'horloge du portable.
" C'est ridicule... je n'aurais pas dû venir... " Et je me lève. Un peu par défi.
Pensant le provoquer. Je m'engage dans une travée, lui tourne le dos,
passe sous les orgues, je fais mine de partir. Surtout, ne pas se retourner.
Avancer droit devant. Ne pas regarder en arrière. Bien que tenté.
Il va peut-être me retenir. Me faire un signe. Quelque chose... J'approche de la porte.
Et je m'arrête net. Je serre les mâchoires. Sur les marches du parvis.
Le soleil sur ma peau.

Il s'est arrêté de pleuvoir.
Je pense à toi. Je souris dans les éclaboussures entre mes cils.
Une grimace. La bouche tordue. La trouée dans les nuages. La chaleur sur mes yeux brûlés.
J'ai besoin d'un geste viril pour masquer mon émotion. Je renifle. J'allume une cigarette.
Et le soleil m'embrasse. Pas aussi bien que toi. Mais il me fait relever la tête.
" Dieu ne parle pas, hein... " Non. Il ne parle pas. Il fait la pluie et le beau temps.
Misérables microbes sur une miette de pain. Je suis l'un d'eux. Les pieds dans les flaques.
Et j'arrache à l'automne une portion de ciel bleu pour panser ma blessure.
Tout est transfiguré. La nacre de la chaussée luisante. Le marbre et le cayrou lavés par la pluie.
Le bois a foncé. Et la verdure avec. La lumière qui neige, prise dans des vitraux.
Et je lève les yeux. " Ok, c'est toi le patron. "
Il n'existe probablement pas. Il existe pour moi. La preuve : je lui parle.
Et il sait que tu existes. Et il sait que je t'aime. Et que je pense à toi.
Quand j'écrase ma clope en riant. C'est une bien belle miette.
Ses microbes sont charmants. Surtout quand ils sont amoureux.
L'homme entré là est sorti différent.
A moins que ce ne soit la ville que l'on ait changée entre-temps.
Une seule chose continue. Et résiste. Une chose perdure. Dans le Yin et le Yang.
Par été comme hiver. Dans le up et le down. Le pansement.
Je pense à toi.

 

 

 

 

Philippe LATGER
Novembre 2011 à Perpignan

 

 

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